Sur le dos du Grand Raid

À vol d’oiseau

Entre Montréal et Paris, le temps file. Les lucarnes sont fermées et je les contemple tour à tour en me demandant à quoi ressemblent les portions de ciel qu’elles dissimulent. Quelques jours me sépareront de la routine familiale, allégeant, du coup, le poids des réflexions. D’une lucarne à mes yeux ne se trace qu’une courte distance. Entre Paris et la Réunion, l’écran de l’ordinateur me rappelle à mes moutons et je bosse alors que mes yeux vacillent. Café et croissants m’accompagnent, sous la lumière tamisée de nos espaces, et je me laisse aller à penser à cette île où j’ai tant rêvé de pouvoir encore poser les pieds.

L’Ile intense

L’aéroport respire la vie. Les chants d’oiseau se font écho et mes lèvres esquissent un sourire. C’est un détail et pourtant, le son de la joie semble circuler de bec en bec. À la sortie, Line et Themy m’accueillent avec enthousiasme. Nous avons formé un petit groupe pour l’aventure. Scindé en deux en frais de répartition pour le logis, je cohabiterai avec Béatrice, Christian, Vero et Joffrey. Nous serons quatre à parcourir le trajet de la Diagonale (près de 170 kilomètres) et trois à emprunter celui de la Mascareigne (une soixantaine de kilomètres). L’époque des colocs en appartement étant passée depuis un bon moment, nous retrouver ensemble me fait l’effet d’un espace, déjà, assez enjoué, tout en apportant ses petits défis. Nous partageons un quotidien exceptionnel dans un espace d’exception, à quelques centaines de mètres de la plage. Travailler, courir, vivre ensemble font du bien, toujours nourris par les levers et les couchers de soleil réunionnais.

Chacun nourri son rêve au quotidien et c’est un peu ce qui nous rassemble ici.


Se réunir, en provenance de tous les coins du monde, à la Réunion. Du porche de la chambre d’hôtel, Sangé me raconte ce moment où il a choisi de quitter son village natal. Issu d’une famille de six enfants, responsables, tour à tour, de prendre soin l’un de l’autre alors que père et mère travaillaient dans les rizières, il tricote ses souvenirs en mots pour répondre à mes questions. La distance et l’émotion offrent un fil neutre, un fil qui permet de transmettre avec simplicité ce qui pourrait être si complexe à raconter. Perdre un membre de la famille, fuir la guerre civile, reprendre le chemin de l’école malgré les barrières, apprendre une autre langue, puis quitter le pays en quête d’un avenir à recréer.

La course est le ferment de son quotidien. Son oxygène.

Mes mains reposent sur mes cuisses pendant que j’observe les deux bracelets tout juste posés sur mes poignets: un rouge pour la navette et un jaune pour la Diagonale. Christian et Béatrice me partagent leurs prévisions, en termes de temps de parcours, afin que nous puissions nous retrouver à l’arrivée. Tous semblent fin prêts. Les encouragements et les souhaits se font écho, dans la voiture, jusqu’au point de chute de la navette. En prenant mes sacs de ravitaillement, je tourne la tête pour voir plusieurs autres coureurs venir s’installer au sol, sur le trottoir, histoire de patienter en position tout sauf debout pendant l’attente. L’autobus navette se présente comme une fleur en milieu de rue et nous embarque, direction St-Pierre. Dans la moiteur d’une soirée qui s’entame doucement, on nous dépose non loin du site de départ. Sacs en main, je marche le long d’une rue en observant mes congénères masculins s’arrêtant ici et là pour aller au petit coin. L’option coin de portail n’est pas envisageable dans mon cas…J’accélère le pas en vue de trouver, aussi rapidement que possible, un ilot toilette. Et c’est à sa sortie que j’entame le petit passage menant à l’entrée du site, peuplée de bénévoles et de tables d’inspection du matériel.

Une vague de visages connus va et vient pendant l’heure qui précède le départ: Anne et Sébastien, la sensation du jour, Casquette verte, Joffrey, Kelsey, Line et Themy et même Christophe, l’un de mes acolytes du Mexique. Les quelques minutes s’écoulant avant de me placer dans la zone qui m’est attitrée me trasmettent une ferveur et une excitation propices à sourire encore.

La Diagonale

En bordure de route, à St-Pierre, les chandails blancs et jaune se multiplient d’instant en instant. Une brise saline navigue entre les passants. Son odeur est douce et elle me guide vers le sas de départ. Ma mémoire cherche des souvenirs pouvant être accolés à chacun des moments qui se présentent. Trois ans plus tard, la sensation d’un départ unique ne s’estompe pas. Peut-être n’existe-t-il pas deux trajets semblables et ce, même si le coup d’envoi du soir marquera, dès 21 heures, la trentième édition du Grand Raid de la Réunion. J’ai choisi, pour une deuxième fois, de parcourir le tracé de la Diagonale des fous.

Trois ans déjà depuis que j’ai fait le vœu de remettre les pieds à l’Ile de la Réunion pour la parcourir à nouveau. Ce qui me paraissait alors très long s’évanouit dans l’instant et je me sens complètement enracinée à la réalité esquissée par ce nouveau départ. Près de 3000 coureurs font partie du lot et s’apprêtent à fouler les mêmes espaces, les racines, les rochers, les falaises. À traverser des lieux parfois semi-désertiques, parfois verdoyants. Cinq vagues se partagent le sas de départ et c’est dans la foulée l’une des autres que nous nous élançons. Lentement, les visages s’estompent dans le flot d’une respiration qui prend ses aises pour mieux ancrer un instant qui en accroche un autre.

Les minutes se passent et les passants se font de plus en plus bruyants, leurs mains se tendant vers nous en guise d’encouragement. La masse devient, au fil des kilomètres, un tableau de couleurs, de senteurs et de sons voués à donner, peut-être, des ailes aux raideurs. Le ventre me tiraille de plus en plus, comme saisie par une pression que je n’ai pas envie de ressentir. Prendre le pouls de ce que ressens, c’est accepter d’embrasser une expérience qui risque de ne pas être celle que j’anticipe, puisqu’une fois encore, les « données » inconnues et l’absence de certitudes font partie de l’ensemble.

Courir en bord de route, puis arriver rapidement au Domaine Vidot marque le premier point de passage. Pointage et remplissage se font avec efficacité et la reprise mène à un sentier que je reconnais. Apprécier fait partie de mes petits bonheurs, le souffle des coureurs qui m’entoure aussi, accompagnant le mien dans un effort de concentration. Le sentier monte et redescend comme une montagne russe, nous permettant d’offrir de petites poussées, puis de relancer pour aller de l’avant. Je caresse d’un peu trop près le barbelé qui nous entoure, mais heureusement, mon gant en sera le seul cisaillé. Rochers, tranchées et noirceur avivent nos regards. Le pavé débouche parfois au coin du sentier et nous le gravissons pour atteindre un autre embranchement.

Nez de bœuf et Notre Dame de la Paix

La course étant constituée de perpétuelles ascensions et de descentes leur succédant, l’objet de mon attention demeure fixé sur ce qui se passe momentanément et j’envisage, le plus possible, les pointages, comme les ravitaillements (lesquels sont parfois distincts), un à la fois. Chaque croisée, chaque changement de terrain offre une opportunité de ralentir ou d’accélérer en fonction de notre état, de ceux et celles qui nous entourent – nous sommes parfois nombreux – de l’ouverture dont nous disposons en vue de courir plus amplement ou encore de nous amarrer au rythme d’un autre.

Plus l’heure avance, plus le froid se fait sentir. Approcher Nez de bœuf me paraît plutôt stimulant. Lors de ma première expérience en Diagonale, j’y avais atterri avec une migraine carabinée. J’ai la sensation, ici, de transcender l’espace et le temps pour soigner quelque chose. La réflexion métaphysique ne s’étend pas, car les besoins prioritaires prennent les devants : remplir les gourdes, prendre quelques fruits, une soupe et repartir le tout à la main, prête à enfiler mon manteau entre quelques bouchées salées-sucrées.

Les bruits environnants se font maintenant ponctuels et nous indiquent qu’une station de pointage ou un lieu de rdv pour l’assistance se trouvent à proximité. Un père et son fils nous offrent des crêpes, sourire aux lèvres. Chaque rencontre, aussi brève soit-elle, invite à saisir, comme un cadeau, la beauté de l’instant qu’elle nourrit. Côtoyer les coureurs, tantôt volubiles, tantôt silencieux, écouter leur accent, le ton de leur voix, leur discours….

Mare-à-bout

Le ravitaillement de Mare-à-bout est bondé. Remplissage et choix d’aliments s’avèrent donc un peu élastiques; d’un côté comme de l’autre, on tente de se faufiler pour être efficace, mais aussi pour éviter de prendre froid. La grisaille nous enveloppe et je goûte le plat qui me fera bientôt l’effet d’une épée de Damoclès. Entre deux mondes, reprendre la cadence vers cette nouvelle section me paraît particulièrement difficile. J’en ai pourtant un bon souvenir. Et je sais que les kilomètres à suivre sont susceptibles de s’avérer exigeants. Malgré l’habitude, malgré les risques, je n’ai pas prévu la possibilité de me sentir indisposée à ce point sur le plan digestif. Les petites montées dans les nuages de Mare-à-bout me paraissent habillées de points blanc et chaque déplacement me fait l’effet d’une coupure en oxygène, comme si je n’arrivais pas à respirer avec l’amplitude dont je sais mon corps capable. Le ralentissement est brutal, mais il semble être la seule option pour continuer d’avancer. Les racines et les cailloux ornent les bords de falaise. Je les observe en constatant que la brume nous entoure. À chaque souffle, de petits points blancs dansent devant mes yeux. Un tableau semble se dessiner avec l’humidité, la grisaille et ces petits points qui vont et viennent au rythme de l’effort. La descente est moins laborieuse, me permettant de simplement laisser aller mon corps et de faire confiance à mes pieds, à mes jambes. J’y prend plaisir, ce qui m’accompagne dans les montées, lorsque je ne sais plus comment respirer efficacement alors que mon ventre se contracte et se dilate.

Cilaos

L’arrivée à Cilaos, presqu’à mi-parcours, est portée par l’anticipation. Récupérer le premier sac de ravitaillement que j’ai déposé pour y piger quelques effets, tenter le changement de souliers, puis contempler une assiette que je n’arrive pas à manger font partie des essentiels. Un jus, des tranches de pomme et beaucoup d’espoir nous accompagnent moi et bedon distendu alors que nous reprenons la route vers le début du sentier du Taibit, menant à Marla. Marla la belle, Marla la lointaine. Petit village surplombant un nombre incalculable de marches, comme il en existe un peu partout le long du parcours, il nous invite avec sa verdure et ses quelques maisonnettes, perchées aux côtés des rochers. Ce lieu me fait l’effet d’une oasis, alors que je cogite depuis un bon moment à propos de ma capacité à continuer de cheminer le long du tracé de la Diagonale. Des bénévoles nous offrent un ravitaillement et j’arrive à avaler deux ou trois bouchées de macaronis au beurre. Puis on nous fait passer à travers une petite foule dont les applaudissements font sourire et, en l’occurrence, pleurer à la fois. Mon cœur se gonfle et une chaleur nouvelle me parcoure. Je ne sais pas de quoi auront l’air les prochains kilomètres, mais je choisis d’aller le découvrir avec, au cœur, les sourires et les encouragements prodigués par ces gens dont la présence me semble tout à fait magique. J’essuie mes yeux gorgés de larmes en souriant à mon tour.

J’ai bien conscience que le temps file et que la journée tire à sa fin, tout doucement.

Plaine des Merles

Souvenir d’un lieu où la lenteur nourrit encore le souhait de voir le paysage changer. Je ne me sens pas au mieux et mes yeux se concentrent sur les portions de route, route, route, avec la noirceur qui prend de plus en plus d’espace. Réaliser pleinement que je ne serai pas en mesure de m’en tenir aux chronos fixés lors de l’élaboration des hypothèses de course me déçois, mais j’ai bien conscience du privilège que représente l’opportunité d’être ici, sur cette île, à travers les sentiers et les montagnes. L’esquisse de l’abandon s’est précisée assez grassement au cours des dernières heures. Malgré son apparence, j’ai fait le choix d’avancer. Et même si ce lieu n’est pas mon préféré, ma tête et mon coeur chuchotent l’envie que j’ai aussi de voir le jour, de poursuivre. Avec ou sans nourriture, je trouverai bien un moyen.

Roche plate-plateau Cerf 

Ce lieu qui ne semble jamais arriver. Ayant la mémoire de mon passage lors de ma première tentative, je n’arrive pas à saisir la localisation de la station de ravitaillement. Les souvenirs que je conserve des lieux et des sensations s’avèrent habituellement assez francs, mais l’association ne se fait pas ici. Mes pensées se creusent et le froid prend de l’espace au bout de mes doigts. Je réalise peu à peu que ce nouveau parcours offre quelques variations et qu’il n’est donc pas identique à celui que j’avais complété auparavant. Il fait froid. Très froid. La buée s’étire en sortant de nos bouches. Ceux et celles qui s’allongent sous leur couverture de survie me semblent immensément courageux. Juste à faire le tour de la station de ravitaillement et de repos du regard, je me sens plus alerte et plus réveillée. En poursuivant mon trajet le long de petits murets de brique, mon esprit réussit à faire accepter à ma tête qu’il nous faudra peut-être nous poser quelques minutes quelques minutes ici et là lorsqu’il fera plus chaud.

Grande-Place-les-bas

Ou le prolongement de l’impression de ne jamais arriver à destination. Les intersections et les points d’eau me confondent. Peut-être la sensation de ne pas reconnaître le tracé est-elle simplement exacerbée par la fatigue. Je passe rapidement cette section, me permettant un arrêt pour fermer les yeux pendant quelques minutes au besoin. Le long du tracé, ce sera la lumière de ma montre qui fera foi d’alarme lorsqu’il me faudra rouvrir les paupières. Tranquillement, le soleil se fait de plus en plus présent, répandant sa chaleur de façon croissante et même si je sais qu’elle peut s’avérer cuisante, je l’apprécie. L’idée principale étant de continuer d’avancer et de penser à m’hydrater avec constance.

Deux Bras 

Un enchaînement de descentes, de sauts entre les rives, de bonds pour franchir d’énormes rochers s’ensuit en direction de Deux bras. La traversée de ce qui ressemble à un réservoir, le long de la tuyauterie, me rappelle les années passées dans la région de Shawinigan, au Québec. Le temps est radieux et je me réjouis du simple fait d’apprécier ces moments où mon corps accepte de pousser pour vivre les descentes avec rythme et fluidité. J’apprendrai plus tard que ce lieu est aussi celui où l’une de nos comparses, Béat, s’est solidement blessée (ce qui ne l’a pas empêchée de compléter son parcours). Le ravitaillement se compose de plusieurs tentes militaires, tantôt munies de lits de camp, tantôt de tables et de chaises adjacentes à la cuisinette, tantôt d’un vaste espace d’entreposage pour les sacs de ravitaillement des coureurs. Assise avec, devant moi, une assiette composée de saucisse et de tranches de fruits, un jus à la main, je tente de me convaincre d’essayer d’avaler quelque chose. Le jus, tout de mangue composé, est absorbé alors qu’un journaliste de Réunion Première, la chaîne de télé locale, s’approche pour me poser des questions. Son sourire fait du bien, mais il semble tout aussi suspicieux que moi quant à la teneur de mon assiette. Quelques minutes de discussion s’écoulent et j’essaie une bouchée de saucisse, geste qui se solde en explosion de liquide en direction de mes voisins de table. La deuxième bouchée me convainc qu’il est temps de reprendre la route et je m’exécute, tout en sueur avant même d’avoir réellement repris le pas de course. Et le plus drôle: je croyais que Deux Bras allait signer la fin du tracé des ascensions, mais il se trouve que non. En quittant le point de ravitaillement, il s’en pointe une autre. Ce moment est celui où je me demanderai pourquoi, mais oh pourquoi, des familles et des vacanciers s’amusent à emprunter ce sentier abrupt, où la végétation est un peu aride par sécheresse et où des jambes fatiguées se sentent rapidement exaspérées. Ma conclusion, en montant: le piment de la saucisse décuple la chaleur.

Chemin Ratineau

Ce passage me rappelle des souvenirs, comme l’impression de marcher dans les rues de l’un des villages de mon enfance. Peut-être mon subconscient le traite-t-il à l’image de mes souvenirs d’Afrique (j’y ai habité étant enfant). Pour la deuxième fois, tout me semble familier et familial ici. Une brève incursion dans la section des arbres penchés et des cordes auxquelles s’accrocher, quelques chemins bordés de petites pierres et de racines, l’impression de me rapprocher de la ville et des bouts de conversation, au passage, captent mes sens. Je ne me demande même plus comment avancer: il est certain que ce parcours se terminera en entrant au stade de la Redoute.

La Possession

Un espace-temps où se prolonge une chaleur extrême. Je rêve de piscine, d’océan et de jets d’eau. En profiter pour m’asperger au maximum à la station de ravitaillement, puis le long de la route, où un bon samaritain nous attend avec son boyau d’arrosage propulsant un arc en ciel de miracles fait partie des cadeaux du moment. La route goudronnée et des restes de crème solaire font partie de ce qui ajoute aux sourires et aux encouragements des passants. Nids d’oiseaux, parc école, airs typiques, panneaux d’affichage que l’on ne peut retrouver qu’ici font partie des petits trésors que ma mémoire enregistre.

Grande Chaloupe

Lieu de commémoration et début du sentier des Anglais, ce point d’arrêt marque un regain frugal alors que je réussis à manger six tranches de pommes. Les quartiers d’orange ne passent pas. Ils se déposent le long du Sentier des Anglais, que j’emprunte avec une joie renouvelée. Poser le pied sur chacun des rochers qui s’emboitent au sol, sautiller de l’un à l’autre, trouver, du regard, les lignes permettant de réaliser un parcours le plus linéaire possible capte complètement mon attention. Là où nombre de coureurs et de coureuses semblent avancer péniblement, j’ai, chaque fois (lire: parcouru deux fois en 2019 et une fois avant la course de cette année), la sensation de revivre en entamant ces quelques kilomètres. Les points de vue donnant sur l’océan ont quelque chose de rafraîchissant. Le parcours se déroule comme de petites vagues s’étalant de haut en bas, puis de bas en haut. Le rythme des coureurs s’étend, lui aussi, de tout son long entre les bosses et les creux.

Colorado
Colorado: toujours trop long quand on se sent fatigués. Il s’étend comme un désert ascendant entre les amoncellements de maisons, quelques étendues de verdure et des pans de route goudronnée. Chaque petite section donne l’impression qu’on arrive au sommet (point qui nous indique que s’amorcera la dernière descente) sans toutefois confirmer cette impression. La métaphore parfaite du jeu psychologique entre en scène ici. Du sable en bloc, du sable en tranchées, des embranchements sablonneux et de la poussière de sable au passage sous nos pieds, autour de nos corps, devant nos yeux. Je ne regarde pas en arrière, parce que je préfère m’imaginer que ce qui se déroule devant moi me rapproche dangereusement de mon but: dévaler la pente qui abrite les derniers kilomètres pour me précipiter, en un morceau, vers la ligne d’arrivée. Ceux et celles qui ont pris le temps de faire une ou encore de multiples reconnaissance(s) d’avant course au Colorado sont fous. Un peu plus que les autres. Mais puisque la participation au Grand raid implique son lot de folie, on se retrouve.

Le coucher de soleil est ahurissant. Je prie pour pouvoir étirer le temps afin d’éviter d’allumer ma lampe frontale. Savourer, en poussant le corps, la technicité du parcours comme les dernières lueurs du jour s’étendant sur les rochers, se déposant sur le feuillage, faisant miroiter une casquette au passage et briller mes yeux, représentent l’ultime plaisir d’être à la veille de compléter une épreuve. Mes jambes n’ont plus de freins. Et mon coeur sourit. Enfin, encore.

La Redoute

Une approche presque nocturne, la musique qui retentit avec la voix de l’annonceur, puis les gens de la ville qui se cordent à la sortie de la descente peuplent l’atmosphère. En levant les yeux, j’aperçois soudainement Vero, qui me suit, en courant parallèlement à moi, sur la route, puis Béat et Christian, longeant jusqu’à l’embouchure du stade. J’avais oublié qu’il nous fallait courir la piste et momentanément, le moteur de mon cerveau appuie sur l’embrayage, histoire de plonger au-delà de la ligne d’arrivée. Je ne réfléchis plus qu’aux prochaines secondes. Puis survient l’éclair euphorisant: j’ai réussi à compléter ce que je ne croyais jamais pouvoir finir sans absorber le nécessaire, nutritionnellement parlant. Je m’étale de tout mon long sur des blocs de bois, juste assez toastée pour savourer cet instant. Je n’ai définitivement pas faim et prendre une douche est alors mon plus grand fantasme. En voyant s’approcher les amis, l’émotion me submerge. Leur présence me fait l’effet d’un gigantesque élan de support. Et je comprends à quel point franchir une ligne d’arrivée en pays étranger, tout en sachant qu’on est accompagné.e, quelque part, de quelque façon, peut réchauffer le coeur.

Un merci unique et vibrant à vous, Béat, Christian, Vero, Joffrey, Line et Themy; faire équipe de voyage en votre compagnie fut magique.

Merci Sangé pour ta générosité et pour ton temps

Merci Christophe, Cindy et Tino pour le bord de mer en bonne compagnie

Courage à tous ceux et celles qui prendront, un jour ou l’autre, le chemin de l’Ile intense. À vivre, à pied et à vol d’oiseau!

Tricotés serrés, du coeur aux sentiers

Photo: courtoisie

Originaires de la région de Saguenay, Audrey Tremblay et Stephan Perron ont toujours été actifs. De la planche à neige au vélo, en passant par la course, ils se sont donné pour mission de mettre l’activité physique au coeur de leurs routines. D’année en année, les opportunités et les occupations les ont rapprochés de ce qui est, aujourd’hui, une passion qu’ils partagent à plusieurs groupes de gens, soit la famille VO2 dont ils sont les instigateurs, avec quelques ami(e)s. Ils ont notamment sillonné les parcours de l’Ultra trail Harricana, du Québec Méga Trail, de l’Ultra trail Académie et de l’UTMB. D’emblée et de coeur, ils sont     « tricotés serrés ».

Audrey – Force tranquille 

Présente, humble et complètement investie. C’est ce qui me vient lorsque j’écoute Audrey. Son bagage est inspirant et elle entretient ce lien qui la relie à Stephan, à sa famille, à la vie en nature, lesquels transparaissent dans chacun de ses partages. « On a toujours été actifs et on incluait les enfants là-dedans. Moi je me souviens, je partais avec mes gars dans le bébé joggeur, je courais ou on accrochait la poussette sur le vélo et on s’en allait avec les enfants ». Il y a un moment, Audrey n’arrivait pratiquement plus à marcher. La douleur ayant perduré pendant une dizaine d’années l’a conduite sur une table d’opération. On lui a alors posé une hanche artificielle, ce qui a donné un nouveau souffle au parcours actif. Elle avait trente-neuf ans.

« Moi, j’étais plus une cycliste qu’une coureuse. Je trouve ça beaucoup plus facile de faire du vélo que de la course. Puis, un moment donné, Stephan s’est mis à faire des marathons, donc j’ai embarqué aussi. Progressivement, de cinq, dix à demi marathon; je ne faisais pas de marathons dans ce temps-là. On faisait beaucoup de route, puis on s’est retrouvés sur les sentiers. On était un peu sceptiques au départ ».

Audrey a participé à sept éditions du Grand Défi Pierre Lavoie à vélo. Quand même! Elle avait eu l’opportunité d’essayer la course en trail avec un groupe auparavant, mais ne s’y était pas vraiment plongée, démotivée par une fracture de stress. Pour le couple, habitué à naviguer au-travers d’une dizaine de courses par année, le plongeon dans l’univers du trail aura été un beau remède à la récurrence des blessures. Dans l’univers de la course, Audrey se lance des défis. Au demi marathon comme ailleurs, elle s’élance avec beaucoup d’enthousiasme, mais aussi une certaine appréhension : « C’est moi qui me mets de la pression. Je ne suis pas une coureuse rapide, mais je veux améliorer mon temps. On dirait que je me mets de la pression parce que je veux que Stephan soit fier de moi, qu’il soit impressionné…peut-être parce que je veux avoir sa reconnaissance, parce qu’il est tellement incroyable ». Et Stephan de dire qu’elle n’en a absolument pas besoin. L’admiration, le soutien transpire dans cette espace où partager une course est une formidable expérience, malgré tout.

 

Stephan – Instigateur

Stephan occupe deux emplois. Il consacre une grande portion de son temps, en termes de travail, au milieu de l’informatique. Il a également fondé, avec son ami Dominic, la Boutique Vo2, laquelle a contribué à construire cette communauté de la course en sentier à Saguenay et dans les environs. D’emblée, il partage que la course à pied ne faisait autrefois pas partie de ses activités quotidiennes. « C’est Marie-Claude, entraîneure au gymnase où je travaillais qui m’a dit que je devrais faire de la course à pied. Que je me débrouillerais. Suite à ça, j’ai participé à quelques courses, dont un demi marathon, à Ottawa. Au fil d’arrivée, j’ai dit à Audrey que je ne voulais plus jamais en faire ». Trois semaines plus tard, il enchaînait avec un marathon et ne s’est pas arrêté depuis. Éventuellement, Stephan a été ralenti par plusieurs blessures et c’est à l’appel de certains amis, l’ayant invité à venir faire quelques sorties en trail, qu’il a répondu, histoire de changer le mal de place. Aujourd’hui et après avoir notamment couru Montréal (troisième au fil d’arrivée), Ottawa et Boston, il se consacre à la course en sentier. Les groupes de course de sa boutique lui permettent de partager cette passion à l’année, laquelle semble aussi créer un esprit de famille caractéristique. Comme le terrain n’est pas toujours accessible, l’entraînement hivernal implique certaines sorties sur route, question pratique, consacrées aux intervalles. Ils s’offrent de longues sorties en nature les weekends et elles sont précieuses!

Au cours des trois dernières années, Stephan s’est impliqué auprès de la Trail Académie, mise en place par Olivier Le Méner. C’est une collaboration qui s’est avérée enrichissante et qui se perpétue. Qui sait? Peut-être que de nouveaux défis naîtront de ces échanges. À son écoute, la simplicité et cette même complicité qui le relie à Audrey, à la famille et qui leur permet, je crois, de transporter tout un vent d’action, d’activité à l’équipe Vo2, sont palpables.

 

Des projets communs, c’est important – Famille, Boutique Vo2 et groupes de course

L’adoption de jumeaux, Eli et Thomas, puis d’une jeune demoiselle, Noah, auront contribué à construire une famille qui a grandi, comptant aussi, aujourd’hui deux chiens, un lézard, un oiseau. Maintenant âgés de dix-huit et treize ans, les enfants ne suivent pas toujours leurs parents. Au fil des années, l’activité physique est demeurée au centre des préoccupations. À preuve, Audrey et Stephan en ont fait une priorité. À la boutique Vo2, ils sont à même d’échanger avec une clientèle de passionnés en tous genres et de gens qui souhaitent s’initier aux sports tels que la course en sentier, la course sur route, le vélo, le ski, etc. À ce jour, le Club V02 compte une centaine de membres.  Stephan et Audrey ont ainsi installé une routine leur permettant de garder un équilibre tant familial, professionnel que personnel.

La discussion s’oriente vers les choix de course. Audrey est communicative et me semble aussi un peu timide quant à l’exploration de ceux-ci. D’emblée, elle présente cette démarche comme une initiative de Stephan. « C’est Stephan qui va cibler les courses, surtout. On aime ça tous les deux. Moi, je choisis des distances qui peuvent m’aller là-dedans. J’aime ça qu’il y ait de petites distances parce que je ne fais pas d’ultras encore ». Elle a pris part au 42 km de l’UTHC l’an dernier et s’est offert tout un accomplissement. Elle envisage l’expérience du Bromont Ultra (55km) et, à nouveau, de l’UTHC en prenant un départ au 65 km.

« Mon plus grand coup de coeur, ça a été le fait de pouvoir être accompagnatrice sur le parcours du QMT, pour Stephan, l’an dernier. Ça a été une de mes plus belles courses. Je n’avais aucun stress de temps et de performance. J’avais peur de ne pas courir assez vite, mais finalement, ça a super bien été ». Stephan semble sourire au bout du fil. Il partage ce moment où le rythme avait, incontestablement, diminué, où la sensation de courir étaient devenue tout autre. Stephan et Audrey s’esclaffent au rappel de ces souvenirs. Audrey craignait de ne pas pouvoir remplir son rôle en fonction de la vitesse de course habituelle, mais l’ensemble des circonstances et sa volonté ont nourri un espace propice à l’accomplissement. Il s’en dégage une connivence, une complicité remplies de force et de tendresse à la fois. Un partage authentique. Le cadeau, peut-être, de la plus belle équipe à laquelle on puisse aspirer.

En début d’année, les calendriers ne se sont pas remplis, ce qui était inhabituel, mais assumé. Courir avec plaisir et voir ce que les mois apporteraient étaient écrits. Alors que le printemps a quelque peu modifié les plans de tout-un-chacun, c’est réellement ce qui s’est ancré dans la routine. Pas de plan. Sortir, simplement et apprécier le déplacement. « On s’entraîne pour les bonnes raisons, peut-être. On s’entraîne parce qu’on a envie de s’entraîner », partage Stephan. La motivation est commune et elle se partage à deux. Le groupe Vo2, une grande famille, est dispersé, mais on ne l’oublie pas.

Photo: courtoisie

Retour sur l’UTMB

L’été dernier, Stephan prenait part à L’Ultra Trail du Mont Blanc : « Ça a été une expérience incroyable. Si moi j’ai couru pendant trente-neuf heures, Audrey n’a pas dormi non plus pendant trente-neuf heures ». Audrey accompagnait Stephan : « Le premier ravito, quand il est arrivé, j’ai failli lui dire « Arrêtes tout ça là. Je ne l’ai pas fait, mais j’y ai pensé ». Malgré la technicité et la difficulté du parcours, l’expérience semble avoir été grandiose. C’était un rêve, un objectif devenu réalité. Audrey n’a pas pu y courir, mais elle est heureuse d’avoir pu suivre et accompagner son homme. La fierté qui se dégage d’une gestion commune, de cet appui qu’ils s’offrent l’un à l’autre dans ce cadre comme à la vie en général inspirent encore. Au cours de cette aventure, des liens se sont tissés. Stephan raconte l’histoire de son parcours en parlant de cet espagnol avec lequel il est encore en contact aujourd’hui : « On s’est rencontrés pendant la course. Il voulait abandonner. Il avait dit à son ami ‘’Si ce canadien-là arrête, moi j’arrête’’. Moi, je n’arrêtais pas. Je l’ai motivé, sans trop savoir comment j’ai fait. Je lui ai parlé comme dans Les Boys. On s’est serrés dans nos bras et on a pris une bière ensemble après ». Ces rencontres sont uniques et elles nous marquent.

L’un comme et l’autre sont d’accord à ce sujet. Audrey mentionne : « Stephan m’inspire beaucoup. Je le vois aller et je suis tellement fière de lui, de le voir faire de belles réalisations comme ça. Ça rend de bonne humeur, s’entraîner. C’est bon pour nous tous ». Stephan fait le lien avec le dépassement de soi, la gestion du temps, la conciliation travail-famille et le fait de nourrir cet équilibre. « Il y a Pierre Lavoie que je trouve inspirant compte tenu de ce qu’il a traversé avec ses enfants. Il doit avoir six ou sept ans de plus que moi, il est vraiment en forme et il performe encore. Mais au-delà de la performance, c’est de la façon dont il le fait. Sa blonde est à ses côtés, il a toujours une bonne attitude dans les courses, il a le sourire, il respecte les gens sur les ravitos. Pour ce qu’il dégage, c’est un modèle pour moi. C’est un plaisir aussi, la course ». En passant outre la notion de performance, on met l’accent sur l’expérience, sur le plaisir et le dépassement, chacun, chacune à sa façon.

Et pour la suite?

Dans un avenir plus lointain, La Western State Endurance Run (160km) et la Diagonale des fous (165km) sont des pistes pour Stephan. Audrey parle de demi Ironman et d’une course avoisinant la centaine de kilomètres, mais elle croit avoir besoin d’y penser encore. Chose certaine : avant la cinquantaine serait l’objectif. Un cadeau garant de la santé. En attendant, le travail à la boutique Vo2 l’occupe à temps plein et Stephan navigue entre ses deux occupations. L’été s’en vient. Il portera son lot de soleil, on l’espère, au-delà de l’incertitude. Et peut-être quelques nouveaux parcours partagés à deux, en attendant de pouvoir mettre le camion – le West vert –  sur la route de l’aventure.

Photo: courtoisie

Renée Hamel – En sentinelle

En sentinelle

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Photo: courtoisie

Posée, présente et passionnée. C’est ce qui se ressent dans le ton de sa voix, dans les images captées lors de ses périples à la course comme à la marche. Renée Hamel évolue dans l’univers du trail depuis plusieurs années déjà. Revenue précipitamment d’un périple au Chili et en Argentine, elle se raconte et raconte cette nature grandiose offrant, à ceux qui la visitent, le cadeau de l’expérience. L’émerveillement. Comme si le temps comportait, après tout, un caractère un peu relatif.

La Patagonie en  sabbatique

Alors que 2020 a pris sa lancée, Renée s’est affairée à ouvrir, à nouveau, une porte sur le Monde. Factrice chez Poste Canada, elle s’est octroyé un congé sabbatique, histoire de transposer la marche en ville en une aventure bien particulière. En mode course, elle s’est plongée au coeur d’espaces ayant attiré son attention au préalable ou encore une fois sur les lieux. Les tracés possibles en vue de réaliser des périples journaliers se sont présentés au fil des rencontres, des conversations, des découvertes. Dans un lieu où tout semble nouveau, les cartes ont été mises sur la table, littéralement, pour tracer les itinéraires.

À la fin de l’année 2019, j’ai eu l’opportunité de discuter avec Renée de ses plans. Elle envisageait parcourir plusieurs régions et s’inspirer de ce qui se faisait pour se donner de nouveaux défis, pour explorer, en solo, l’idée première étant de se donner l’opportunité de se consacrer à la passion qu’elle entretien pour la course à pied dans un cadre différent, en sortant de la routine, en se retrouvant face à elle-même et donc, à ses propres limites. Elle a ainsi fait le choix de débarquer en ville – vol intérieur direct de Punta Arenas, au Chili, pour se diriger vers une campagne assez lointaine : le parc Torres Del Paine. C’est un endroit connu, où l’on peut naviguer, dans les sentiers, sur un trajet d’environ 120 km. On ne peut pas, à l’heure actuelle, franchir cette distance sans réserver plusieurs nuits en hébergement. La réglementation en place exige la preuve des réservations, lesquelles sont normalement vérifiées par chacune des stations de garde sur le terrain en vue de réaliser ce parcours sur une période de huit jours. L’idée de Renée était de compléter le trajet, si possible, en une seule sortie. Elle transportait l’essentiel à même son sac de course. « Tout le long du parcours, c’était magnifique! Ce que j’aimais le plus, c’était d’être toute seule. Je suis arrivée à un glacier et puis j’étais toute seule à le regarder. Apprivoiser la nuit, aussi. J’ai souvent peur de me perdre et là, c’était presque impossible. Mon état d’esprit était vraiment stable. Je n’avais pas peur. Il y avait peut-être des pumas à un endroit, mais comme j’y suis passée de jour, ça allait ».

Établir un record de parcours…avec surprise!

Son deuxième projet a pris son envol à El Chalten, un petit village en Argentine. On peut y parcourir des sentiers à partir de son épicentre. Ayant complété toutes les randonnées d’une journée, elle s’est tournée vers un trajet qui se complète habituellement en un laps de temps plus long. Renée y a vu une ouverture, mais elle ne se sentait pas à l’aise de franchir les rivières et le trajet, moins bien balisé, sans accompagnement. Le campement étant souvent l’occasion de discuter, de rencontrer d’autres aventuriers, l’opportunité s’est présentée : un norvégien, Hans Kristian Smedsrod, expressément venu d’Europe pour réaliser plusieurs tracés au pays, envisageait compléter le trajet du Huemul (70 km) afin de battre le record de parcours précédemment établit. Il y avait fait une reconnaissance, était bien équipé et recherchait une personne pouvait compléter le parcours avec lui, histoire d’assurer une certaine sécurité pour l’un comme pour l’autre.

Au final, ils y auront mis quatorze heures trois minutes, établissant un nouveau record de parcours. « Ça a été magique, vraiment incroyable. À El Chalten, il y a beaucoup moins de monde et beaucoup de possibilités de sentiers, tandis qu’à Torres Del Paine, il n’y a qu’un tracé accessible. C’est peut-être un peu moins majestueux, donc, que Torres Del Paine, mais vraiment beau et tellement magique, avec un dénivelé avoisinant les 3000 m. J’étais contente de le faire avec quelqu’un, parce que je ne voulais pas me perdre et tu sais, la tyrolienne, avec un harnais, je n’avais encore jamais fait ça. J’aurais pu le faire toute seule, mais le courant de l’eau, s’encorder, c’était immense ».

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Photo: courtoisie

Traverser la frontière

Deux jours plus tard, Renée a enfilé son gros sac à dos pour traverser la frontière de l’Argentine au Chili à pied, soit en passant par la Careterra Austral, au Chili. Le temps estimé était de onze heures pour une distance de 36 km. Elle en a mis sept et demie, parcourant de trajet en une journée. Arrivée de l’autre côté de la frontière, elle s’est arrêtée et a déposé sa tente pendant deux jours, s’offrant un jeûne de 48 heures au passage. Elle n’avait pas prévu cette expérience au préalable, quelques surprises s’étant pointées à l’horizon, mais elle en a tiré profit et en a aussi relevé quelques apprentissages : « C’était pas tellement une bonne idée de faire un jeûne après sept heures de marche (36 km) et un soixante-dix km en montagne. J’ai vu que je me sentais fatiguée. Je sentais que je n’avais pas d’énergie. Mais je trouve ça intéressant parce que ça n’était pas dangereux, ça n’a pas mal viré et puis ce sont des expériences. Un voyage, c’est toutes sortes d’expériences. J’apprécie de voir comment je vis celles-ci, la façon dont je vais y faire face, comment je vais y réagir. Ce qui est bien quand on voyage tout seul, c’est que l’attention est portée sur soi, sur ce qui se passe vraiment. On est vraiment connecté au moment présent ».

Une semaine plus tard, ayant discuté avec plusieurs voyageurs, elle est parvenue à se rendre sur les lieux d’un nouveau parc afin de compléter un dernier parcours, soit un circuit d’environ 55km, localisé à Cerro Castillo. Il n’y avait pas beaucoup de latitude concernant la fenêtre météo et les accès pour réaliser le trajet dont on lui avait parlé. Le délai, relativement court, entre ses deux projets, la barrière de la langue et une petite fatigue ne l’ont pas empêchée de plonger dans l’aventure. Ayant été accueillie « au milieu de nulle part » – lire : une hutte en plein désert, elle s’est élancée sur un tracé qui s’est avéré, finalement, assez bien balisé. L’idée était de parcourir le sentier en s’y collant, le plus possible, tout en réussissant à voir les lagons, au nombre de trois, dont on lui avait parlé. La journée avancée, après s’être un peu perdue, le dernier d’entre eux lui a offert sa vue. C’était la dernière journée dont elle disposait, le dernier défi. Elle y aura mis onze heures, quelques détours et un grand sourire. « J’ai aimé l’inconnu, vivre avec peu, réaliser que nous n’avons pas besoin de grand chose, que c’est simple. Me rappeler, aussi, que je pouvais prendre soin de moi, bien me traiter, me laisser aller, m’écouter ».

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Photo: courtoisie

À chacun ses défis

Au final, elle en retient qu’il est important que chacun respecte ses défis. Qu’on ne peut pas toujours se comparer. Que lorsqu’on entreprend quelque chose, la dimension de plaisir occupe une place importante. « Comme je dis aux gens que j’entraîne, je ramène toujours ça à « est-ce que j’ai du plaisir quand je cours? » Que je fasse cinq ou dix kilomètres en une heure, c’est une question qui se pose. Je cours à une vitesse où je me sens bien. Je fais quelque chose qui me parle. C’est, encore et surtout, de respecter que chacun établit son objectif et que c’est correct. Qu’il n’y en n’a pas un qui soit meilleur que l’autre ». La variété des expériences, que l’on parle de course ou d’autre chose, demeure impressionnante et inspirante, bien entendu, mais son essence se loge dans la façon dont elles résonnent pour chacun et chacune d’entre nous.

Le retour aura été marqué par le choc et le décalage quant aux réactions des gens, à ce qui se dépeignait sur les visages, au passage, à l’aéroport. Des airs désespérés, des yeux à peine exposés alors que le reste est emmitouflé, une chasse aux billets d’avion pour rentrer. Par la présence, virtuelle, aidante et aimante, de son amoureux, lequel était prêt à tout pour qu’elle puisse revenir au pays.  À Québec, les rues étant vides et la quarantaine nécessaire, le temps s’écoule jusqu’au retour au travail et il laisse doucement émerger les pensées, les idées. Le voyage semble déjà loin. Mais il reviendra. Toujours.

Avec le plaisir

Avec l’imprévu

Avec les défis

 

 

Les explorateurs de l’aube

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Photo: courtoisie

Les explorateurs de l’aube

Martine Marois et Danny Landry partagent la vie à la maison comme à la course. Ils ont instauré, à même leur quotidien, une routine qui donne à ce sport un élan et qui leur permet de grandir à travers l’expérience. La complicité qui les unit est palpable. Ils s’offrent un défi comme un plaisir dont on se délecte et dont on se souvient jour après jour en l’intégrant à notre réalité. Derrière eux: la découverte de la course en sentier. Au-devant: le Tor des Géants, à nouveau. Et entre les deux, un moment pour se préparer, mais aussi pour se poser.

Devant une montagne

Leur aventure commune s’est amorcée dans le virage d’un défi sportif encadré par Martine, alors coach chez Esprit de Corps. Tous deux parents monoparentaux, l’entraînement et la montagne ont dévoilé une opportunité qui s’est avérée cruciale dans la suite des événements. Préparation, ascension et covoiturage ont tissé la trame de ce qui allait se construire dans la plus grande ouverture. Le secret? C’est la faute de la Gaspésie. C’est aussi, je crois, l’élan qu’ils insufflent à chacune des expériences qu’ils entreprennent. Ils s’entraînent ensemble aux petites heures, pendant que nombre de gens dorment encore. Le plaisir et la découverte les guident. Ils ont soif de défis qui dépassent l’entendement. On pourra d’ailleurs les considérer, maintenant, comme des habitués du tracé du Tor des Géants, un événement qui en secoue plus d’un.

Au fil des courses

Danny exprime : « On courait déjà tous les deux. Avant qu’on ne se connaisse, je courais un peu. J’avais déjà fait des demi-marathons, des trucs comme ça. Je n’avais jamais fait plus long que ça, mais je courais à toutes les semaines, j’étais très actif. Martine faisait déjà ça, elle aussi, de son côté, alors je pense que lorsqu’on a commencé à être en couple, ça s’est installé tout seul parce qu’on partageait déjà cette passion-là et on l’a développée à deux ». Chacun avait développé une aisance à la course, mais l’élément déclencheur, selon Martine, a bel et bien été la course en sentier.

À l’époque, Martine agissait notamment en tant que coach auprès de groupes de coureurs. Ce qui était, à ce moment-là, la plus longue course en sentier au Québec, l’Ultra trail Harricanna, affichait l’ouverture de ses inscriptions. Ayant été mise au défi par un coureur, Martine s’est engagée à s’inscrire et Danny aussi, motivé par l’idée d’aller explorer ses limites. Le plan initial était de franchir la distance de 65 km. À la suite d’une invitation à intégrer, sans frais supplémentaires, les rangs des partants pour le 80 km, le plan prenait une tangente un peu différente. Dans la conception qu’en avait Danny, courir 65 ou 80 km, c’était du pareil au même. Martine avait plutôt en tête : « Non, mais, c’est parce que tu n’as jamais couru de marathon… ».

En vue de réaliser ce défi de taille pour lequel ils n’avaient aucun comparatif, ils ont pris le départ de l’Ultra trail du Mont Albert afin de compléter le trajet de 42 km. Expériences un et deux en poche, heureux, mais éprouvés, ils n’ont jamais cessé de se lancer des défis en course en sentier depuis. La première année aura été une année de découverte. Danny en dit aussi : « Après ça, on a comme juste augmenté et on a été de plus en plus audacieux, même si on savait qu’on aurait pu juste travailler à améliorer nos temps. On choisissait une distance supérieure et on se disait « On verra où ça va nous mener ».

L’année suivante, quelques abandons lors de longs parcours, en course, ont eu un impact intéressant. Plutôt que de se sentir décontenancés devant le choix de mettre un terme à une expérience en cours, ils ont surtout retenu le plaisir et la joie de pouvoir identifier les points forts tout comme les dimensions à parfaire en vue de retenter le coup, d’entreprendre de nouveaux défis.

Martine a grandi en jouant au basketball, puis en pratiquant la course sur route, principalement. Danny jouait au hockey et s’est tranquillement dirigé vers la course à pied. Ils se sont retrouvés là où les chemins n’existent pas, là où il importe de faire confiance à la nature : dans les sentiers, à flanc de montagne, en se rendant jusqu’aux sommets.

Être contagieux

La course en sentier, pour Martine et Danny, est synonyme d’aventure à vivre en équipe. Ils ont convenu de progresser ensemble, en respectant le rythme propre à chacun. En se retrouvant, inévitablement, quelque part. Martine évoque : « C’est moi qui propose, tout le temps, les plans de fou. C’est moi qui vais chercher la documentation et tout ça. Une fois qu’on est sur la montagne, c’est Danny la sécurité. C’est Danny la sagesse.  On fait une superbe équipe pour explorer ». Danny ajoute qu’il ne voit pas de limites. Il se plaît à trouver des défis qui peuvent sembler insurmontables. Il en dit d’ailleurs : « Parfois, les gens pourraient dire ‘’Ben voyons, c’est complètement malade! T’as pas fait tes classes encore.’’, mais j’ai besoin de me dire

C’est infaisable, ça n’a pas de bon sens? Ok, j’y vais ». Ils sont tous deux d’accord : « C’est l’expérience qu’on va chercher. On est des gens de processus…plus que de performance ». Ils aiment en profiter, parler, aller à la rencontre des gens et rire ensemble, même – et surtout – dans les moments qui s’avèrent exigeants. Le plaisir qu’ils en retirent prend tout son sens dans la satisfaction personnelle, l’accomplissement ressenti plutôt que dans un classement. Ils ont soif d’aventure et parmi celles qui ont capté leur attention, le Tor des Géants en est une. Cette épopée, ils l’ont vécue à plus d’une reprise (une et demie pour Martine, la première se terminant au 192e km, et deux pour Danny). Entre temps, Danny s’est également senti interpellé par le triathlon et a complété un Ironman, une expérience qu’il a adorée, mais la course demeure la piste favorite.

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Photo: courtoisie

Les défis à venir

Le temps n’a pas usé leur volonté. Au contraire, elle est encore forte. Forte de ces expériences, forte de ces moments uniques qui peuplent leurs saisons. Martine, Kinésiologue et kinésithérapeute de formation, prépare les plans. Organisation et inspiration sont au rendez-vous afin de construire ce qui les mènera sur le parcours, jusqu’à la ligne d’arrivée, si tout va comme prévu. Ils se connaissent. Ils savent de quoi ils ont besoin. À ce propos, il y a quelques années, Martine a été diagnostiquée coéliaque. C’est un des facteurs qui auront véritablement remodelé l’entraînement ainsi que la préparation, comme la gestion de l’alimentation – un élément d’ores et déjà crucial – lors d’un événement.  Ils se préparent en courant à la frontale, aux petites heures du matin, ou encore au retour du travail. Pendant la semaine, Martine court davantage alors que Danny s’entraîne à vélo. Les weekends se construisent autour de sorties dans les Montagnes Blanches, un vaste terrain de jeu et d’entraînement.

Encore cette année, le Québec Méga Trail risque d’être à l’horaire avant l’objectif Tor des Géants. « Ma vision en lien avec cette course commence vraiment à se placer. Je sais quel est l’effort que j’ai mis et ce que j’ai à mettre de plus pour améliorer mon temps. Je suis déjà entrain de faire ce travail psychologique de préparation mentale ». Danny ajoute : « Il y a deux choses qui vont aider à ton succès : tu as l’expérience du terrain et tu as aussi une équipe de soutien ». Car, lors de cette édition, Danny agira en tant qu’équipe pour venir en aide à Martine. De son côté, il envisage compléter un défi différent, où elle l’accompagnerait, à son tour. On sent que la ligne directrice est claire et que l’énergie investie est entière. Aucune ambiguïté. Et même si le doute se levait, il irait probablement boire une tisane en attendant le prochain train. L’inspiration se lève, je crois, et elle irradie de la détermination qu’on peut ressentir dans la communication partagée par cette équipe. La complémentarité offre une latitude qui semble permettre à chacun de rayonner, d’y trouver son compte et de terminer, ici ou ailleurs, tout près de l’autre.

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Photo: courtoisie

Entre la route et la montagne

De Montréal à la Gaspésie, les années ont passé. Ils se sont rencontrés une première fois, un projet de montagne en tête et ils ont eu, je crois, cette opportunité de faire grandir un rendez-vous qui se renouvelle avec la grandeur de l’expérience, du partage qu’ils en font, des apprentissages qu’ils en retirent. Martine continue de proposer des « plans fous » et Danny s’y investi avec coeur, y trouvant sa douce vêtue d’une grande force, mais aussi en traçant son chemin avec cette passion qu’est la course en sentier. Dans la lignée, des projets tels que le Tor des Glaciers sont dans l’air. Mais d’abord, place au moment. En souhaitant vivement que l’été soit synonyme d’ouverture, d’instants qui se multiplient, conduisant aux montagnes d’aujourd’hui et de demain, plein soleil.

Jessica Lange et Olivier Le Méner: une équipe de choc

Une équipe de choc

Photo: Courtoisie Jessica et Olivier

Leur rire est contagieux. Échanger un moment avec Olivier Le Méner et Jessica Lange, c’est prendre le temps de plonger au coeur d’une équipe à toute épreuve, d’un noyau qui se transpose, dans le temps, avec une constance et une volonté qui impressionnent. Ils ont chacun leur bagage et pourtant, leurs expériences de vie se fondent en un seul trésor, bien ancrées dans le quotidien.

Les débuts

Jessica a grandi dans un village où pratiquer la course à pied était plutôt marginal. « J’ai toujours été une passionnée de course à pied, dès mon plus jeune âge. Dans le secteur où j’habitais, j’étais la seule à courir. C’était comme pas le sport, en plus, à ce moment-là, qui était connu et reconnu. Mais moi j’aimais ça. À travers les années, ça a été un petit peu comme un dancing. Parfois je reprenais la course. Parfois j’arrêtais ». Se remettant tout d’abord à courir pour accompagner Olivier alors qu’ils venaient de s’installer au Québec, elle ne s’est jamais arrêtée depuis.  À la base, elle a toujours aimé la vitesse. « Après, j’ai commencé à faire un peu plus de longue distance en accompagnant Olivier en trail. J’ai toujours fait de la course sur route. Le trail était donc très, très nouveau pour moi. J’ai commencé à le suivre un petit peu et il est vrai que j’aime beaucoup l’environnement et c’est de là que j’ai commencé à faire un petit peu plus de longue distances ».

Olivier, à grands renforts de confiance, relate son expérience de vie en tant que militaire : « J’ai réussi à entrer dans l’armée – j’avais emmené Jessica, je lui avais fait quitter son travail. J’étais persuadé que j’allais entrer dans la marine et en fait, j’étais entrain d’échouer à mes tests de course. J’avais un 8 km à faire en trail et arrivé à cette sortie, je me suis foulé la cheville le long d’une rivière ». À ce moment-là, Olivier croyait s’être perdu le long du parcours. Puis un ami est arrivé, derrière lui, et lui a offert de l’aide en portant son sac. Il ajoute : « Tu sais, ça pesait 15 kilos. Et là, j’ai allumé. Le cerveau a dû déconnecter. J’ai oublié ma douleur, je l’ai suivi, j’ai avancé, puis il m’a redonné mon sac. On a fini ensemble et j’ai réussi à être pris dans ces classes-là, à suivre la formation que je voulais tant suivre ». Il s’est toujours entraîné depuis. L’entraînement a fait partie de son quotidien et c’est ce qu’il s’applique à transmettre, jour après jour, auprès de ses clients, des athlètes, de ses collègues, de sa famille.

Ce qui les relie

À l’écoute de Jessica et d’Olivier, je me sens attendrie par la force de la communication qu’ils entretiennent et par la façon dont ils en font un langage commun. On peut sentir que les chemins les ont fait grandir et qu’ils ont en main tout un bagage pour courir à travers la vie. Outre trois beaux enfants, tout aussi éveillés, curieux et actifs qu’eux, ils ont donné vie à une passion qui s’est construite au fil des défis.

Originaires de France, ils sont arrivés au Canada avec le désir de s’y installer. La transition aura été un moment bien particulier, comme Olivier était pris par le travail…et la poutine! Reprendre du mieux, physiquement parlant et garder la forme ont été des facteurs déterminants pour la suite, pour le rythme qu’a adopté la famille, pour pouvoir accompagner Jessica dans ses projets, elle qui s’était aussi remise à la course entre temps, histoire de retrouver son homme et de le suivre dans sa routine. Olivier, qui se décrit comme un coureur social, évolue dans le monde de la course en appréciant particulièrement soutenir des gens, les aider à atteindre leur plein potentiel. C’est un peu ce qu’il vit maintenant avec Jessica, en prenant soin de l’épauler dans sa démarche et de la suivre, peu importe le rythme qu’elle choisira d’adopter. Il exprime : « Je serai toujours à ses côtés. Quand on a des sorties ensemble, c’est vraiment, pour moi, une sortie ensemble. Je la consacre à ce que Jessica soit à son rythme. Qu’on puisse discuter si elle en a envie. Ou alors si elle me dit « On force un peu plus aujourd’hui« , on y va. C’est d’ailleurs pour ça que je m’entraîne fort. Pour pouvoir accompagner tout le monde dans différents types de sorties ».

Les défis qui suivront

À l’heure actuelle, Olivier et Jessica courent surtout en mode endurance. Olivier ajoute : « On est plus en mode discussion. C’est comme une réunion de couple, ces sorties, maintenant. On refait et on discute de nos projets. En fait, on passe du temps de couple de qualité quand on prend ces temps de sortie alors qu’avant, justement, le fractionné et tout…courir avec la montre…On poussait plus la machine, alors on avait moins de temps pour nous deux ». Ce sont des moments qu’ils partagent parfois aussi avec leurs filles et ceux-ci revêtent un caractère tout spécial. Il s’agit d’une conception différente de la course, centrée sur les moments agréables et actifs qui peuvent être partagés.

Au fil des sorties, les projets sont nombreux et ils émergent de ces discussions qu’ils partagent. La course les amène plus loin. Elle transporte la réflexion et nourrissent les rêves qui deviennent des objectifs. Plus ils cheminent, plus leurs chemins semblent se rapprocher. Olivier gère l’Ultra Trail Académie et développe les tuques Owl Active alors que Jessica construit à partir de ce qu’elle souhaite transmettre sur les plans psychologique et physique.

De fil en aiguille

Inspirés par de nombreuses personnes, par ce mode de transport qu’est la course, ils tissent leur avenir. Olivier parle de Florent Bouguin : « Il me pose plein de questions, notamment à propos de mon avenir professionnel…tout ça en courant. Il m’encourage énormément dans ce que je fais, dans les projets que je monte pour le trail. C’est important aussi pour lui, la communauté. On a des valeurs qui sont assez proches, donc je pense que c’est pour ça qu’on se retrouve assez souvent ». Jessica, de son côté, pense à Serge Girard : « C’est un français qui s’est mis à la couse à pied vers l’âge de quarante-cinq ans. En fait, il a fait le tour du monde en courant. C’est un grand inspirateur, avec beaucoup d’humilité. Il m’a raconté son histoire. C’est important pour lui de ne pas donner de conseils. Il m’a raconté sa façon de faire, qui m’a d’ailleurs beaucoup aidée pour mes vingt-six marathons ».

L’année qui se dessine apporte avec elle ses projets qui appellent à être développés et dévoilés. Pour l’équipe de choc, la course transforme le quotidien et les place dans une dimension où l’action prédomine. « On est dangereusement ambitieux! », ajoute Jessica. De ces dix à quinze heures consacrées à la course, un bouquet de créativité et de précieux échanges voient le jour. Ce sont ces moments qui contribuent à créer autant de souvenirs qu’un avenir où tout peut être possible.