Jessica Lange et Olivier Le Méner: une équipe de choc

Une équipe de choc

Photo: Courtoisie Jessica et Olivier

Leur rire est contagieux. Échanger un moment avec Olivier Le Méner et Jessica Lange, c’est prendre le temps de plonger au coeur d’une équipe à toute épreuve, d’un noyau qui se transpose, dans le temps, avec une constance et une volonté qui impressionnent. Ils ont chacun leur bagage et pourtant, leurs expériences de vie se fondent en un seul trésor, bien ancrées dans le quotidien.

Les débuts

Jessica a grandi dans un village où pratiquer la course à pied était plutôt marginal. « J’ai toujours été une passionnée de course à pied, dès mon plus jeune âge. Dans le secteur où j’habitais, j’étais la seule à courir. C’était comme pas le sport, en plus, à ce moment-là, qui était connu et reconnu. Mais moi j’aimais ça. À travers les années, ça a été un petit peu comme un dancing. Parfois je reprenais la course. Parfois j’arrêtais ». Se remettant tout d’abord à courir pour accompagner Olivier alors qu’ils venaient de s’installer au Québec, elle ne s’est jamais arrêtée depuis.  À la base, elle a toujours aimé la vitesse. « Après, j’ai commencé à faire un peu plus de longue distance en accompagnant Olivier en trail. J’ai toujours fait de la course sur route. Le trail était donc très, très nouveau pour moi. J’ai commencé à le suivre un petit peu et il est vrai que j’aime beaucoup l’environnement et c’est de là que j’ai commencé à faire un petit peu plus de longue distances ».

Olivier, à grands renforts de confiance, relate son expérience de vie en tant que militaire : « J’ai réussi à entrer dans l’armée – j’avais emmené Jessica, je lui avais fait quitter son travail. J’étais persuadé que j’allais entrer dans la marine et en fait, j’étais entrain d’échouer à mes tests de course. J’avais un 8 km à faire en trail et arrivé à cette sortie, je me suis foulé la cheville le long d’une rivière ». À ce moment-là, Olivier croyait s’être perdu le long du parcours. Puis un ami est arrivé, derrière lui, et lui a offert de l’aide en portant son sac. Il ajoute : « Tu sais, ça pesait 15 kilos. Et là, j’ai allumé. Le cerveau a dû déconnecter. J’ai oublié ma douleur, je l’ai suivi, j’ai avancé, puis il m’a redonné mon sac. On a fini ensemble et j’ai réussi à être pris dans ces classes-là, à suivre la formation que je voulais tant suivre ». Il s’est toujours entraîné depuis. L’entraînement a fait partie de son quotidien et c’est ce qu’il s’applique à transmettre, jour après jour, auprès de ses clients, des athlètes, de ses collègues, de sa famille.

Ce qui les relie

À l’écoute de Jessica et d’Olivier, je me sens attendrie par la force de la communication qu’ils entretiennent et par la façon dont ils en font un langage commun. On peut sentir que les chemins les ont fait grandir et qu’ils ont en main tout un bagage pour courir à travers la vie. Outre trois beaux enfants, tout aussi éveillés, curieux et actifs qu’eux, ils ont donné vie à une passion qui s’est construite au fil des défis.

Originaires de France, ils sont arrivés au Canada avec le désir de s’y installer. La transition aura été un moment bien particulier, comme Olivier était pris par le travail…et la poutine! Reprendre du mieux, physiquement parlant et garder la forme ont été des facteurs déterminants pour la suite, pour le rythme qu’a adopté la famille, pour pouvoir accompagner Jessica dans ses projets, elle qui s’était aussi remise à la course entre temps, histoire de retrouver son homme et de le suivre dans sa routine. Olivier, qui se décrit comme un coureur social, évolue dans le monde de la course en appréciant particulièrement soutenir des gens, les aider à atteindre leur plein potentiel. C’est un peu ce qu’il vit maintenant avec Jessica, en prenant soin de l’épauler dans sa démarche et de la suivre, peu importe le rythme qu’elle choisira d’adopter. Il exprime : « Je serai toujours à ses côtés. Quand on a des sorties ensemble, c’est vraiment, pour moi, une sortie ensemble. Je la consacre à ce que Jessica soit à son rythme. Qu’on puisse discuter si elle en a envie. Ou alors si elle me dit « On force un peu plus aujourd’hui« , on y va. C’est d’ailleurs pour ça que je m’entraîne fort. Pour pouvoir accompagner tout le monde dans différents types de sorties ».

Les défis qui suivront

À l’heure actuelle, Olivier et Jessica courent surtout en mode endurance. Olivier ajoute : « On est plus en mode discussion. C’est comme une réunion de couple, ces sorties, maintenant. On refait et on discute de nos projets. En fait, on passe du temps de couple de qualité quand on prend ces temps de sortie alors qu’avant, justement, le fractionné et tout…courir avec la montre…On poussait plus la machine, alors on avait moins de temps pour nous deux ». Ce sont des moments qu’ils partagent parfois aussi avec leurs filles et ceux-ci revêtent un caractère tout spécial. Il s’agit d’une conception différente de la course, centrée sur les moments agréables et actifs qui peuvent être partagés.

Au fil des sorties, les projets sont nombreux et ils émergent de ces discussions qu’ils partagent. La course les amène plus loin. Elle transporte la réflexion et nourrissent les rêves qui deviennent des objectifs. Plus ils cheminent, plus leurs chemins semblent se rapprocher. Olivier gère l’Ultra Trail Académie et développe les tuques Owl Active alors que Jessica construit à partir de ce qu’elle souhaite transmettre sur les plans psychologique et physique.

De fil en aiguille

Inspirés par de nombreuses personnes, par ce mode de transport qu’est la course, ils tissent leur avenir. Olivier parle de Florent Bouguin : « Il me pose plein de questions, notamment à propos de mon avenir professionnel…tout ça en courant. Il m’encourage énormément dans ce que je fais, dans les projets que je monte pour le trail. C’est important aussi pour lui, la communauté. On a des valeurs qui sont assez proches, donc je pense que c’est pour ça qu’on se retrouve assez souvent ». Jessica, de son côté, pense à Serge Girard : « C’est un français qui s’est mis à la couse à pied vers l’âge de quarante-cinq ans. En fait, il a fait le tour du monde en courant. C’est un grand inspirateur, avec beaucoup d’humilité. Il m’a raconté son histoire. C’est important pour lui de ne pas donner de conseils. Il m’a raconté sa façon de faire, qui m’a d’ailleurs beaucoup aidée pour mes vingt-six marathons ».

L’année qui se dessine apporte avec elle ses projets qui appellent à être développés et dévoilés. Pour l’équipe de choc, la course transforme le quotidien et les place dans une dimension où l’action prédomine. « On est dangereusement ambitieux! », ajoute Jessica. De ces dix à quinze heures consacrées à la course, un bouquet de créativité et de précieux échanges voient le jour. Ce sont ces moments qui contribuent à créer autant de souvenirs qu’un avenir où tout peut être possible.

Ces couples qui courent – Anne Bouchard et Sylvain Rioux

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Photo, courtoisie, Anne Bouchard et Sylvain Rioux

Anne Bouchard et Sylvain Rioux font partie de ces personnes que l’on croise et dont on se souvient. La CCC, l’UTMB, le North Face Endurance Challenge, le QMT et la Gaspésia 100 font partie des courses qui les ont vu courir, gagner, supporter et former une équipe incomparable.

« Je me disais que pour la séduire, je devais la faire rire.  Mais à chaque fois qu’elle riait, c’est moi qui tombait amoureux ».

Tommaso Maria Ferrari (1649, 1716)

Au bout du fil, Anne et Sylvain parlent en voix complices. Ils ont pris un moment, un vendredi soir, afin de discuter à propos de course et de couple. L’ouverture et la simplicité, dans la communication, sont désarmantes.  D’entrée de jeu, Anne confie qu’il y a des zones qu’ils partagent et d’autres qu’ils ne partagent pas. Les routines semblent établies pour durer. C’est d’ailleurs ce qui se dégage de leur union. L’ultramarathonienne et le duathlète ont trouvé une recette qui résonne pour eux.

La course et son noyau

Près de treize ans après leur première rencontre, Anne et Sylvain, respectivement âgés de 45 et 46 ans, construisent encore en conciliant les entraînements, la vie de couple et la vie de famille. Leurs deux enfants font partie de cette équipe de choc. Ils apprennent en suivant leur propre voie, entourés de parents qui sortent de l’ordinaire et qui se permettent de vivre ce qui les passionne. Anne introduit le sujet en mentionnant : « Je n’étais pas une sportive du tout. Je n’avais jamais fait de sport d’endurance. C’est Sylvain l’athlète, le coureur en fait. C’est un duathlète, il a fait six championnats du monde et la course à pied, il connait ça. Moi, je suis un fille de montagne. Je viens du milieu de l’escalade. Et quand j’ai découvert le trail running, c’est devenu mon nouveau défi ».

La flamme de la course en sentier avait été allumée. Anne l’exprime de façon convaincue en mentionnant que pour Sylvain, le déclic n’avait pas été si soudain. Il le dit d’ailleurs en rapatriant ses souvenirs : « J’ai grandi en Abitibi. Mon père est un travailleur forestier. Il partait travailler en chantier et quand il revenait, il était super en forme. Il gardait sa forme en allant courir, comme il courait des 10 km quand il avait une ou deux semaines à la maison. Mon père, c’était mon idole, mon modèle. J’allais courir de temps en temps avec lui et c’est comme ça que j’ai accroché à ce sport-là ». Pour Sylvain, le parcours s’est tissé, de fil en aiguille, depuis l’école, avec ses olympiades, suivi de l’athlétisme, en passant par une ouverture vers la course sur route, laquelle lui a permis de gravir des marches et d’acquérir de l’expérience dans la discipline du duathlon (course et vélo). Le duathlon aura fait figure d’aventure s’échelonnant sur une dizaine d’années, période pendant laquelle Anne s’est éventuellement mise à la course en sentier.

Nouveaux défis, nouveaux chapitres

« Quand j’ai fini mon duathlon, je m’étais dit : je ne fais plus de compétition. Je me tiens en forme pour le reste de ma vie. C’est tout. Mais, très rapidement, j’ai vu qu’il y avait un espèce de gros vide. C’est Anne qui a ouvert le chemin du trail, puis je me suis aventuré. J’y ai vraiment pris plaisir ».

Alors que la discussion va bon train, Anne souligne que leur expérience de la course est distincte, même s’ils s’y retrouvent. Ils en parlent d’ailleurs chacun à leur tour et adressent leur vécu individuel antant que commun avec lucidité. Anne mentionne : « C’est pas une zone de grande entente, entre Sylvain et moi, la course. Tranquillement, on s’en vient sur un terrain d’entente parce qu’on a deux attitudes totalement opposées par rapport au sport. Sylvain est un gars performant. Moi, je suis une fille de bonheur ». Pas toujours facile de partager des moments d’entraînement, en course à pied, quand les optiques et les perceptions divergent!

Elle ajoute : « Depuis que j’ai un nouveau coach, j’ai cette zone de performance-là à aller toucher et c’est Sylvain qui m’amène dedans. On se rejoint. C’est limite encore et ce sont des entraînements isolés,  mais on ne va pas faire quatre heures de course ensemble ». Sylvain s’entraîne en semaine, au coeur de Montréal, dans le secteur du Mont-Royal, en sillonnant les rues qui jalonnent son parcours. Il ne sort pas beaucoup en forêt, mais y arrive en participant à différentes courses. De son côté, Anne se concentre exclusivement sur les parcours d’entraînement en sentier..ou presque! Elle court pour se rendre au Mont-Royal, pour additionner les kilomètres et fréquente la montagne, à l’extérieur de la ville, le weekend. Travaillant en collaboration avec un nouveau coach, elle applique les modifications au plan d’entraînement, lesquelle implique de marteler un peu plus fréquemment le sol des rues de ville. Chose aisée, tant pour elle que pour Sylvain, comme la petite famille est logée au coeur de la Métropole.

Conciliation, le mot magique…non sans effort!

Qui dit famille, couple et entraînement soutenu dit conciliation. C’est là que se pointe la routine. Anne explique qu’elle s’entraîne deux fois par jour. Elle se lève à 04 :30, s’entraîne, revient à la maison et s’occupe des boites à lunch avant le départ pour l’école et le boulot. Son deuxième entraînement se fait à l’heure du midi. Sylvain, quant à lui, insère ses plages d’entraînement dans son horaire de travailleur autonome : « J’essaie de bloquer deux heures à tous les jours. Ça représente un défi et des sacrifices. Entre 8h et 17h, je concilie le travail, l’entraînement et tout ce que j’ai à faire personnellement ». Le mercredi est une journée de course partagée, comme Anne et Sylvain vont s’entraîner ensemble sur piste au Centre Claude Robillard. Ces moments ont un caractère bien spécial, comme l’explique Anne : « Sur la piste, Sylvain me sort de ma zone de confort. Ces moments-là sont devenus aussi un meeting familial. Pendant le vingt minutes de réchauffement, on jase de notre planning familial, de nos enfants, de nos défis. On se fait vraiment un conseil de famille. Cet entraînement-là est devenu presque essentiel dans la conciliation de tout ça. Ça nous permet d’enfin échanger sur nos réflexion, de faire avancer le bateau de la famille ». Tous deux s’accordent pour dire que ces moments sont d’une qualité exceptionnelle.

 

Un mode de vie

Courir, pour Anne et Sylvain, fait partie d’une hygiène de vie et d’une façon de l’appliquer qui modèlent le quotidien, mais aussi la vision de ce qui suivra. D’un défi qui devait marquer la fin du parcours en course (la CCC), Anne en est venue à cibler de nouveaux objectifs : « Maintenant, les défis, je les veux, je les garde et c’est essentiel. Dans ce mode de vie-là, je ne suis tellement pas rendue encore au bout des réflexions que ça m’apporte et des réflexions que ça me fait faire en tant qu’être humain ». La course est un vecteur d’énergie et alimente les journées. Sylvain, lui, se positionne comme « un athlète réserviste ». Il s’entraîne pour se sentir vraiment en forme et choisi ses défis en fonction des possibilités, des ouvertures relativement au plan qu’Anne aura dressé pour sa saison. Tous deux estiment que son rôle de soutien en est un qui est capital et cela fait partie de ce qui cimente l’équipe. Parce qu’Anne et Sylvain travaillent ensemble lors des courses auxquelles elle participe. Ici ou ailleurs, il lui prête main forte et l’assiste, que ce soit en personne ou de façon virtuelle. L’efficacité s’allie à la complicité. Ils en ont notamment fait l’expérience alors qu’Anne se joignait à un camp d’entraînement relevé, en Europe, l’été dernier. 2020 apporte son lot de nouveaux défis et de vacances aussi. En famille, ils prennent soin de distinguer les deux. Cet été, la Canadian Dead Race et la Sinister Seven feront partie des courses auxquelles Anne participera, entourée de ses enfants, précieusement aidée par Sylvain.

Enfin…

La force d’un couple repose entre autres sur ce qui se construit et ce , dès le tout début. À l’origine de leur rencontre, les mots suivant ont été partagés par Sylvain: « Belle, brillante, sensible, extravertie, rayonnante, authentique, aventurière, talentueuse…toutes ces qualités me sont apparues lorsque j’ai rencontré Anne dans un souper d’amis communs où elle racontait des histoires de vie quotidienne et où elle m’a fait tellement rire. La femme de mes rêves était apparue. C’était un ressenti très fort, inexplicable. Quelques années plus tard, nos chemins se sont recroisés et l’aventure a commencé. Premier rendez-vous…à courir au Mont-Royal. Le coq, à son apogée athlétique, se rend compte qu’Anne suit le rythme avec aisance pendant 50 minutes alors qu’elle n’est pas coureuse du tout! Treize ans plus tard, cette même fougue, profondément humaine, ne la lâche pas et j’adore »! De l’un à l’autre, la foulée s’est allongée. La confiance s’est installée, avec les défis, les projets. Et ils courent encore.

Un grand et doux merci à Anne, à Sylvain et aux enfants pour le partage et pour l’inspiration. Quatre plumes en mouvement qui en inspireront encore bien d’autres!