Un déménagement, quatre mois de physiothérapie, une pratique de repos -pleinement yoga, pleinement nidra -et le développement d’une routine avec chiot plus tard, le printemps ouvre ses valves. Il laisse couler l’eau d’érable. Les élèves canadiens voient la fin de l’année scolaire se profiler; les travailleurs naviguent sur les eaux de l’horloge nouvelle. À l’échelle mondiale, le beau et le tragique continuent de défiler. Le sens existe et il respire, même quand nous n’y croyons pas. La vie aussi
Dans les fils de cette virée de minutes additionnées, celles qui nous transportent d’une date à l’autre au calendrier, de nouvelles profondeur se découvrent. Elles me laissent entendre, elles me laissent voir et ressentir davantage. Petit à petit, de jour en jour, j’ai l’impression qu’on me reconduit à la maison. L’entraînement court avec moi et la paix qui en émerge me paraît bien douce. Loin de la contrainte, loin de l’échéance. Bouger dans la fluidité. M’immobiliser, puis me reposer dans la fluidité. Sans chercher encore à construire des châteaux d’heures pour en faire davantage.
Assoiffée d’être entière
Heureuse de constater que le paradigme connait ses fluctuations, lui aussi, et que mes grandes trouvent les abords de parcours qui n’ont rien avoir avec le mien. Entre les ronrons, les jappements et le taximom, je profite d’instants que je n’espérais plus, rationnellement parlant. Sur mon tapis de yoga, soutenue tantôt par des coussins, des couvertures, des vêtements en tous genres et autres bizarreries, je reçois chaque respiration avec l’océan du yoga nidra. L’absence de rationalisation pendant que ma conscience navigue sur les paliers de la multidimensionalité me fascine. J’en émerge plus reposée qu’au matin, soulevée par ce qui m’échappe en joute intellectuelle. Et je cours encore. Autrement
Songer à l’équilibre me rappelle que malgré les études, les statistiques et autres fruits de nos humanités, sa conception demeure unique. Nous sommes semblables et pourtant différents. Résultats d’histoires et de réalités juxtaposées. Et comme le printemps, comme la respiration, comme chacun des soubresauts de présence prenant de plus en plus d’ampleur, nous bougeons chacun et chacune à notre façon pour atteindre ce qui a toujours été au coeur de nous.
Une trajectoire tissée d’infini
L’infini de nos galaxies
Our whole house moved, four months of physiotherapy, a rest practice – fully yoga, fully nidra – and the evolution of a puppy routine later, spring has opened its valves. It now lets the maple water flow. Canadian students are eyeing the end of the school year; workers are navigating the waters of the new clock. Globally, both the beautiful and the tragic continue to roll along. Meaning exists and breathes, even when we don’t believe it does. Life too
In the threads of this journey of accumulated minutes, which take us from one date to another on the calendar, new depths are discovered. They let me hear, they let me see and feel more. Little by little, day by day, I feel like I am being guided home. The training runs with me and the resulting peace seems sweet to me. Far from constraints, far from deadlines. Motion in fluidity. Getting still, then resting in fluidity. Without trying to build castles of hours to achieve more.
Thirsty to be whole
Happy to notice that paradigm knows its fluctuations, it too, and that my daughters find approaches to paths that have nothing to do with mine. Between the purring, the barking and the taximom, I enjoy moments I wasn’t expecting anymore, rationally speaking. On my yoga mat, supported by cushions, blankets, clothes of all kinds and other oddities, I receive each breath with the ocean of yoga nidra. The absence of rationalization while my consciousness navigates around the levels of multidimensionality fascinates me. I emerge more rested than in the morning, lifted by what eludes me in intellectual jousting. And I am still running. Otherwise
Thinking about balance reminds me that in spite of studies, statistics and other fruits of our humanities, its conception remains unique. We are similar and yet different. Results of juxtaposed stories and realities. And like Spring, like breathing, like each of the jolts of presence growing larger and larger, we are all moving in our own way to reach what has always been at the very core of us.
Entre Montréal et Paris, le temps file. Les lucarnes sont fermées et je les contemple tour à tour en me demandant à quoi ressemblent les portions de ciel qu’elles dissimulent. Quelques jours me sépareront de la routine familiale, allégeant, du coup, le poids des réflexions. D’une lucarne à mes yeux ne se trace qu’une courte distance. Entre Paris et la Réunion, l’écran de l’ordinateur me rappelle à mes moutons et je bosse alors que mes yeux vacillent. Café et croissants m’accompagnent, sous la lumière tamisée de nos espaces, et je me laisse aller à penser à cette île où j’ai tant rêvé de pouvoir encore poser les pieds.
L’Ile intense
L’aéroport respire la vie. Les chants d’oiseau se font écho et mes lèvres esquissent un sourire. C’est un détail et pourtant, le son de la joie semble circuler de bec en bec. À la sortie, Line et Themy m’accueillent avec enthousiasme. Nous avons formé un petit groupe pour l’aventure. Scindé en deux en frais de répartition pour le logis, je cohabiterai avec Béatrice, Christian, Vero et Joffrey. Nous serons quatre à parcourir le trajet de la Diagonale (près de 170 kilomètres) et trois à emprunter celui de la Mascareigne (une soixantaine de kilomètres). L’époque des colocs en appartement étant passée depuis un bon moment, nous retrouver ensemble me fait l’effet d’un espace, déjà, assez enjoué, tout en apportant ses petits défis. Nous partageons un quotidien exceptionnel dans un espace d’exception, à quelques centaines de mètres de la plage. Travailler, courir, vivre ensemble font du bien, toujours nourris par les levers et les couchers de soleil réunionnais.
Chacun nourri son rêve au quotidien et c’est un peu ce qui nous rassemble ici.
Se réunir, en provenance de tous les coins du monde, à la Réunion. Du porche de la chambre d’hôtel, Sangé me raconte ce moment où il a choisi de quitter son village natal. Issu d’une famille de six enfants, responsables, tour à tour, de prendre soin l’un de l’autre alors que père et mère travaillaient dans les rizières, il tricote ses souvenirs en mots pour répondre à mes questions. La distance et l’émotion offrent un fil neutre, un fil qui permet de transmettre avec simplicité ce qui pourrait être si complexe à raconter. Perdre un membre de la famille, fuir la guerre civile, reprendre le chemin de l’école malgré les barrières, apprendre une autre langue, puis quitter le pays en quête d’un avenir à recréer.
La course est le ferment de son quotidien. Son oxygène.
Mes mains reposent sur mes cuisses pendant que j’observe les deux bracelets tout juste posés sur mes poignets: un rouge pour la navette et un jaune pour la Diagonale. Christian et Béatrice me partagent leurs prévisions, en termes de temps de parcours, afin que nous puissions nous retrouver à l’arrivée. Tous semblent fin prêts. Les encouragements et les souhaits se font écho, dans la voiture, jusqu’au point de chute de la navette. En prenant mes sacs de ravitaillement, je tourne la tête pour voir plusieurs autres coureurs venir s’installer au sol, sur le trottoir, histoire de patienter en position tout sauf debout pendant l’attente. L’autobus navette se présente comme une fleur en milieu de rue et nous embarque, direction St-Pierre. Dans la moiteur d’une soirée qui s’entame doucement, on nous dépose non loin du site de départ. Sacs en main, je marche le long d’une rue en observant mes congénères masculins s’arrêtant ici et là pour aller au petit coin. L’option coin de portail n’est pas envisageable dans mon cas…J’accélère le pas en vue de trouver, aussi rapidement que possible, un ilot toilette. Et c’est à sa sortie que j’entame le petit passage menant à l’entrée du site, peuplée de bénévoles et de tables d’inspection du matériel.
Une vague de visages connus va et vient pendant l’heure qui précède le départ: Anne et Sébastien, la sensation du jour, Casquette verte, Joffrey, Kelsey, Line et Themy et même Christophe, l’un de mes acolytes du Mexique. Les quelques minutes s’écoulant avant de me placer dans la zone qui m’est attitrée me trasmettent une ferveur et une excitation propices à sourire encore.
La Diagonale
En bordure de route, à St-Pierre, les chandails blancs et jaune se multiplient d’instant en instant. Une brise saline navigue entre les passants. Son odeur est douce et elle me guide vers le sas de départ. Ma mémoire cherche des souvenirs pouvant être accolés à chacun des moments qui se présentent. Trois ans plus tard, la sensation d’un départ unique ne s’estompe pas. Peut-être n’existe-t-il pas deux trajets semblables et ce, même si le coup d’envoi du soir marquera, dès 21 heures, la trentième édition du Grand Raid de la Réunion. J’ai choisi, pour une deuxième fois, de parcourir le tracé de la Diagonale des fous.
Trois ans déjà depuis que j’ai fait le vœu de remettre les pieds à l’Ile de la Réunion pour la parcourir à nouveau. Ce qui me paraissait alors très long s’évanouit dans l’instant et je me sens complètement enracinée à la réalité esquissée par ce nouveau départ. Près de 3000 coureurs font partie du lot et s’apprêtent à fouler les mêmes espaces, les racines, les rochers, les falaises. À traverser des lieux parfois semi-désertiques, parfois verdoyants. Cinq vagues se partagent le sas de départ et c’est dans la foulée l’une des autres que nous nous élançons. Lentement, les visages s’estompent dans le flot d’une respiration qui prend ses aises pour mieux ancrer un instant qui en accroche un autre.
Les minutes se passent et les passants se font de plus en plus bruyants, leurs mains se tendant vers nous en guise d’encouragement. La masse devient, au fil des kilomètres, un tableau de couleurs, de senteurs et de sons voués à donner, peut-être, des ailes aux raideurs. Le ventre me tiraille de plus en plus, comme saisie par une pression que je n’ai pas envie de ressentir. Prendre le pouls de ce que ressens, c’est accepter d’embrasser une expérience qui risque de ne pas être celle que j’anticipe, puisqu’une fois encore, les « données » inconnues et l’absence de certitudes font partie de l’ensemble.
Courir en bord de route, puis arriver rapidement au Domaine Vidot marque le premier point de passage. Pointage et remplissage se font avec efficacité et la reprise mène à un sentier que je reconnais. Apprécier fait partie de mes petits bonheurs, le souffle des coureurs qui m’entoure aussi, accompagnant le mien dans un effort de concentration. Le sentier monte et redescend comme une montagne russe, nous permettant d’offrir de petites poussées, puis de relancer pour aller de l’avant. Je caresse d’un peu trop près le barbelé qui nous entoure, mais heureusement, mon gant en sera le seul cisaillé. Rochers, tranchées et noirceur avivent nos regards. Le pavé débouche parfois au coin du sentier et nous le gravissons pour atteindre un autre embranchement.
Nez de bœuf et Notre Dame de la Paix
La course étant constituée de perpétuelles ascensions et de descentes leur succédant, l’objet de mon attention demeure fixé sur ce qui se passe momentanément et j’envisage, le plus possible, les pointages, comme les ravitaillements (lesquels sont parfois distincts), un à la fois. Chaque croisée, chaque changement de terrain offre une opportunité de ralentir ou d’accélérer en fonction de notre état, de ceux et celles qui nous entourent – nous sommes parfois nombreux – de l’ouverture dont nous disposons en vue de courir plus amplement ou encore de nous amarrer au rythme d’un autre.
Plus l’heure avance, plus le froid se fait sentir. Approcher Nez de bœuf me paraît plutôt stimulant. Lors de ma première expérience en Diagonale, j’y avais atterri avec une migraine carabinée. J’ai la sensation, ici, de transcender l’espace et le temps pour soigner quelque chose. La réflexion métaphysique ne s’étend pas, car les besoins prioritaires prennent les devants : remplir les gourdes, prendre quelques fruits, une soupe et repartir le tout à la main, prête à enfiler mon manteau entre quelques bouchées salées-sucrées.
Les bruits environnants se font maintenant ponctuels et nous indiquent qu’une station de pointage ou un lieu de rdv pour l’assistance se trouvent à proximité. Un père et son fils nous offrent des crêpes, sourire aux lèvres. Chaque rencontre, aussi brève soit-elle, invite à saisir, comme un cadeau, la beauté de l’instant qu’elle nourrit. Côtoyer les coureurs, tantôt volubiles, tantôt silencieux, écouter leur accent, le ton de leur voix, leur discours….
Mare-à-bout
Le ravitaillement de Mare-à-bout est bondé. Remplissage et choix d’aliments s’avèrent donc un peu élastiques; d’un côté comme de l’autre, on tente de se faufiler pour être efficace, mais aussi pour éviter de prendre froid. La grisaille nous enveloppe et je goûte le plat qui me fera bientôt l’effet d’une épée de Damoclès. Entre deux mondes, reprendre la cadence vers cette nouvelle section me paraît particulièrement difficile. J’en ai pourtant un bon souvenir. Et je sais que les kilomètres à suivre sont susceptibles de s’avérer exigeants. Malgré l’habitude, malgré les risques, je n’ai pas prévu la possibilité de me sentir indisposée à ce point sur le plan digestif. Les petites montées dans les nuages de Mare-à-bout me paraissent habillées de points blanc et chaque déplacement me fait l’effet d’une coupure en oxygène, comme si je n’arrivais pas à respirer avec l’amplitude dont je sais mon corps capable. Le ralentissement est brutal, mais il semble être la seule option pour continuer d’avancer. Les racines et les cailloux ornent les bords de falaise. Je les observe en constatant que la brume nous entoure. À chaque souffle, de petits points blancs dansent devant mes yeux. Un tableau semble se dessiner avec l’humidité, la grisaille et ces petits points qui vont et viennent au rythme de l’effort. La descente est moins laborieuse, me permettant de simplement laisser aller mon corps et de faire confiance à mes pieds, à mes jambes. J’y prend plaisir, ce qui m’accompagne dans les montées, lorsque je ne sais plus comment respirer efficacement alors que mon ventre se contracte et se dilate.
Cilaos
L’arrivée à Cilaos, presqu’à mi-parcours, est portée par l’anticipation. Récupérer le premier sac de ravitaillement que j’ai déposé pour y piger quelques effets, tenter le changement de souliers, puis contempler une assiette que je n’arrive pas à manger font partie des essentiels. Un jus, des tranches de pomme et beaucoup d’espoir nous accompagnent moi et bedon distendu alors que nous reprenons la route vers le début du sentier du Taibit, menant à Marla. Marla la belle, Marla la lointaine. Petit village surplombant un nombre incalculable de marches, comme il en existe un peu partout le long du parcours, il nous invite avec sa verdure et ses quelques maisonnettes, perchées aux côtés des rochers. Ce lieu me fait l’effet d’une oasis, alors que je cogite depuis un bon moment à propos de ma capacité à continuer de cheminer le long du tracé de la Diagonale. Des bénévoles nous offrent un ravitaillement et j’arrive à avaler deux ou trois bouchées de macaronis au beurre. Puis on nous fait passer à travers une petite foule dont les applaudissements font sourire et, en l’occurrence, pleurer à la fois. Mon cœur se gonfle et une chaleur nouvelle me parcoure. Je ne sais pas de quoi auront l’air les prochains kilomètres, mais je choisis d’aller le découvrir avec, au cœur, les sourires et les encouragements prodigués par ces gens dont la présence me semble tout à fait magique. J’essuie mes yeux gorgés de larmes en souriant à mon tour.
J’ai bien conscience que le temps file et que la journée tire à sa fin, tout doucement.
Plaine des Merles
Souvenir d’un lieu où la lenteur nourrit encore le souhait de voir le paysage changer. Je ne me sens pas au mieux et mes yeux se concentrent sur les portions de route, route, route, avec la noirceur qui prend de plus en plus d’espace. Réaliser pleinement que je ne serai pas en mesure de m’en tenir aux chronos fixés lors de l’élaboration des hypothèses de course me déçois, mais j’ai bien conscience du privilège que représente l’opportunité d’être ici, sur cette île, à travers les sentiers et les montagnes. L’esquisse de l’abandon s’est précisée assez grassement au cours des dernières heures. Malgré son apparence, j’ai fait le choix d’avancer. Et même si ce lieu n’est pas mon préféré, ma tête et mon coeur chuchotent l’envie que j’ai aussi de voir le jour, de poursuivre. Avec ou sans nourriture, je trouverai bien un moyen.
Roche plate-plateau Cerf
Ce lieu qui ne semble jamais arriver. Ayant la mémoire de mon passage lors de ma première tentative, je n’arrive pas à saisir la localisation de la station de ravitaillement. Les souvenirs que je conserve des lieux et des sensations s’avèrent habituellement assez francs, mais l’association ne se fait pas ici. Mes pensées se creusent et le froid prend de l’espace au bout de mes doigts. Je réalise peu à peu que ce nouveau parcours offre quelques variations et qu’il n’est donc pas identique à celui que j’avais complété auparavant. Il fait froid. Très froid. La buée s’étire en sortant de nos bouches. Ceux et celles qui s’allongent sous leur couverture de survie me semblent immensément courageux. Juste à faire le tour de la station de ravitaillement et de repos du regard, je me sens plus alerte et plus réveillée. En poursuivant mon trajet le long de petits murets de brique, mon esprit réussit à faire accepter à ma tête qu’il nous faudra peut-être nous poser quelques minutes quelques minutes ici et là lorsqu’il fera plus chaud.
Grande-Place-les-bas
Ou le prolongement de l’impression de ne jamais arriver à destination. Les intersections et les points d’eau me confondent. Peut-être la sensation de ne pas reconnaître le tracé est-elle simplement exacerbée par la fatigue. Je passe rapidement cette section, me permettant un arrêt pour fermer les yeux pendant quelques minutes au besoin. Le long du tracé, ce sera la lumière de ma montre qui fera foi d’alarme lorsqu’il me faudra rouvrir les paupières. Tranquillement, le soleil se fait de plus en plus présent, répandant sa chaleur de façon croissante et même si je sais qu’elle peut s’avérer cuisante, je l’apprécie. L’idée principale étant de continuer d’avancer et de penser à m’hydrater avec constance.
Deux Bras
Un enchaînement de descentes, de sauts entre les rives, de bonds pour franchir d’énormes rochers s’ensuit en direction de Deux bras. La traversée de ce qui ressemble à un réservoir, le long de la tuyauterie, me rappelle les années passées dans la région de Shawinigan, au Québec. Le temps est radieux et je me réjouis du simple fait d’apprécier ces moments où mon corps accepte de pousser pour vivre les descentes avec rythme et fluidité. J’apprendrai plus tard que ce lieu est aussi celui où l’une de nos comparses, Béat, s’est solidement blessée (ce qui ne l’a pas empêchée de compléter son parcours). Le ravitaillement se compose de plusieurs tentes militaires, tantôt munies de lits de camp, tantôt de tables et de chaises adjacentes à la cuisinette, tantôt d’un vaste espace d’entreposage pour les sacs de ravitaillement des coureurs. Assise avec, devant moi, une assiette composée de saucisse et de tranches de fruits, un jus à la main, je tente de me convaincre d’essayer d’avaler quelque chose. Le jus, tout de mangue composé, est absorbé alors qu’un journaliste de Réunion Première, la chaîne de télé locale, s’approche pour me poser des questions. Son sourire fait du bien, mais il semble tout aussi suspicieux que moi quant à la teneur de mon assiette. Quelques minutes de discussion s’écoulent et j’essaie une bouchée de saucisse, geste qui se solde en explosion de liquide en direction de mes voisins de table. La deuxième bouchée me convainc qu’il est temps de reprendre la route et je m’exécute, tout en sueur avant même d’avoir réellement repris le pas de course. Et le plus drôle: je croyais que Deux Bras allait signer la fin du tracé des ascensions, mais il se trouve que non. En quittant le point de ravitaillement, il s’en pointe une autre. Ce moment est celui où je me demanderai pourquoi, mais oh pourquoi, des familles et des vacanciers s’amusent à emprunter ce sentier abrupt, où la végétation est un peu aride par sécheresse et où des jambes fatiguées se sentent rapidement exaspérées. Ma conclusion, en montant: le piment de la saucisse décuple la chaleur.
Chemin Ratineau
Ce passage me rappelle des souvenirs, comme l’impression de marcher dans les rues de l’un des villages de mon enfance. Peut-être mon subconscient le traite-t-il à l’image de mes souvenirs d’Afrique (j’y ai habité étant enfant). Pour la deuxième fois, tout me semble familier et familial ici. Une brève incursion dans la section des arbres penchés et des cordes auxquelles s’accrocher, quelques chemins bordés de petites pierres et de racines, l’impression de me rapprocher de la ville et des bouts de conversation, au passage, captent mes sens. Je ne me demande même plus comment avancer: il est certain que ce parcours se terminera en entrant au stade de la Redoute.
La Possession
Un espace-temps où se prolonge une chaleur extrême. Je rêve de piscine, d’océan et de jets d’eau. En profiter pour m’asperger au maximum à la station de ravitaillement, puis le long de la route, où un bon samaritain nous attend avec son boyau d’arrosage propulsant un arc en ciel de miracles fait partie des cadeaux du moment. La route goudronnée et des restes de crème solaire font partie de ce qui ajoute aux sourires et aux encouragements des passants. Nids d’oiseaux, parc école, airs typiques, panneaux d’affichage que l’on ne peut retrouver qu’ici font partie des petits trésors que ma mémoire enregistre.
Grande Chaloupe
Lieu de commémoration et début du sentier des Anglais, ce point d’arrêt marque un regain frugal alors que je réussis à manger six tranches de pommes. Les quartiers d’orange ne passent pas. Ils se déposent le long du Sentier des Anglais, que j’emprunte avec une joie renouvelée. Poser le pied sur chacun des rochers qui s’emboitent au sol, sautiller de l’un à l’autre, trouver, du regard, les lignes permettant de réaliser un parcours le plus linéaire possible capte complètement mon attention. Là où nombre de coureurs et de coureuses semblent avancer péniblement, j’ai, chaque fois (lire: parcouru deux fois en 2019 et une fois avant la course de cette année), la sensation de revivre en entamant ces quelques kilomètres. Les points de vue donnant sur l’océan ont quelque chose de rafraîchissant. Le parcours se déroule comme de petites vagues s’étalant de haut en bas, puis de bas en haut. Le rythme des coureurs s’étend, lui aussi, de tout son long entre les bosses et les creux.
Colorado Colorado: toujours trop long quand on se sent fatigués. Il s’étend comme un désert ascendant entre les amoncellements de maisons, quelques étendues de verdure et des pans de route goudronnée. Chaque petite section donne l’impression qu’on arrive au sommet (point qui nous indique que s’amorcera la dernière descente) sans toutefois confirmer cette impression. La métaphore parfaite du jeu psychologique entre en scène ici. Du sable en bloc, du sable en tranchées, des embranchements sablonneux et de la poussière de sable au passage sous nos pieds, autour de nos corps, devant nos yeux. Je ne regarde pas en arrière, parce que je préfère m’imaginer que ce qui se déroule devant moi me rapproche dangereusement de mon but: dévaler la pente qui abrite les derniers kilomètres pour me précipiter, en un morceau, vers la ligne d’arrivée. Ceux et celles qui ont pris le temps de faire une ou encore de multiples reconnaissance(s) d’avant course au Colorado sont fous. Un peu plus que les autres. Mais puisque la participation au Grand raid implique son lot de folie, on se retrouve.
Le coucher de soleil est ahurissant. Je prie pour pouvoir étirer le temps afin d’éviter d’allumer ma lampe frontale. Savourer, en poussant le corps, la technicité du parcours comme les dernières lueurs du jour s’étendant sur les rochers, se déposant sur le feuillage, faisant miroiter une casquette au passage et briller mes yeux, représentent l’ultime plaisir d’être à la veille de compléter une épreuve. Mes jambes n’ont plus de freins. Et mon coeur sourit. Enfin, encore.
La Redoute
Une approche presque nocturne, la musique qui retentit avec la voix de l’annonceur, puis les gens de la ville qui se cordent à la sortie de la descente peuplent l’atmosphère. En levant les yeux, j’aperçois soudainement Vero, qui me suit, en courant parallèlement à moi, sur la route, puis Béat et Christian, longeant jusqu’à l’embouchure du stade. J’avais oublié qu’il nous fallait courir la piste et momentanément, le moteur de mon cerveau appuie sur l’embrayage, histoire de plonger au-delà de la ligne d’arrivée. Je ne réfléchis plus qu’aux prochaines secondes. Puis survient l’éclair euphorisant: j’ai réussi à compléter ce que je ne croyais jamais pouvoir finir sans absorber le nécessaire, nutritionnellement parlant. Je m’étale de tout mon long sur des blocs de bois, juste assez toastée pour savourer cet instant. Je n’ai définitivement pas faim et prendre une douche est alors mon plus grand fantasme. En voyant s’approcher les amis, l’émotion me submerge. Leur présence me fait l’effet d’un gigantesque élan de support. Et je comprends à quel point franchir une ligne d’arrivée en pays étranger, tout en sachant qu’on est accompagné.e, quelque part, de quelque façon, peut réchauffer le coeur.
Un merci unique et vibrant à vous, Béat, Christian, Vero, Joffrey, Line et Themy; faire équipe de voyage en votre compagnie fut magique.
Merci Sangé pour ta générosité et pour ton temps
Merci Christophe, Cindy et Tino pour le bord de mer en bonne compagnie
Courage à tous ceux et celles qui prendront, un jour ou l’autre, le chemin de l’Ile intense. À vivre, à pied et à vol d’oiseau!
Une sonnerie de téléphone s’était étirée, à la fin du mois d’avril, jusqu’à ce que j’atteigne le combiné. En tendant l’oreille, j’ai compris que le quotidien allait changer, encore une fois. Sans drame, mais plutôt dans la perspective d’accueillir une nouvelle vie. En catimini, je m’étais précipitée à l’étage pour aller réveiller ma grande, encore endormie, un sanglot dans la gorge. Il venait de naître.
LA NOUVELLE
Endormie, ma fille avait lentement ouvert les yeux, puis en m’entendant, ils s’étaient remplis de larmes. Zuko, que nous n’attendions plus, ferait notre rencontre en juillet. Et si tout se déroulait bien, il serait dès lors partie prenante de la famille. Nos routines étaient déjà bien occupées, alors entre deux activités, pendant les pauses ou avant de sombrer dans un sommeil agité, le soir, l’une d’entre nous consacrait quelques minutes à envoyer un message afin de recueillir des images et des impressions concernant Zuko. En toute transparence, malgré l’anticipation d’offrir présence et amour à un autre petit être, j’espérais aussi que ça n’arriverait pas tout de suite ou enfin, que le calendrier des portées, couplé à la liste d’attente, se feraient encore bien remplis. Il me semblait tout juste sortir d’une longue et tortueuse boucle de monoparentalité à temps plein en apprenant à composer autrement avec notre réalité. Et pourtant, la cigogne était passée. Et elle avait pensé à nous.
Zuko, de son prénom, est un jeune Montagne des Pyrénées. Sa famille et lui proviennent des Pyrénées du Pignon Rouge, au Québec. Comment, mais comment avions-nous eu cette idée, voir cette audace? Je me le demande encore. Plus sérieusement, ma fille aînée avait mis sur sa liste cette demande depuis un bon moment déjà. La crise au sein de laquelle toute la planète baignait avait accentué le désir d’accueillir un chiot. Ayant côtoyé nombre de chiens errants, de chiens abandonnés et d’autres trésors en situations particulières, concevoir ce type d’adoption était un processus en soit. Puisqu’il ne s’agissait pas de moi et que j’espérais surtout qu’il puisse accompagner les enfants, j’ai fini par accepter. Et puis, j’ai compris que comme on traverse une longue course, il s’agissait d’une forme de défi qui impliquerait bien plus que je ne pouvais alors l’imaginer. Je me plaisais à dire que ma fille, dont Zuko allait être le pupille – n’avait probablement pas conscience de tout ce que l’adoption d’un chien représentait. À la réflexion et avec un peu de recul, j’ai réalisé que c’était aussi mon cas!
QMT
J’ai complété un ultra le trois juillet, au terme de 160 km de course et de marche, franchissant alors une ligne d’arrivée posée au Mont Saint-Anne . En lançant un au revoir à un Québec Mega Trail haut en couleurs, j’ai repris la route vers l’Estrie, consciente du fait qu’il me faudrait plus d’un café pour garder l’oeil ouvert. Le lendemain matin, aux petites heures, ma grande et moi avons pris la route pour St-Wenceslas, dans le Centre-du-Québec. L’émotion était palpable et bien que mon corps ne réponde pas pleinement présent, mes réflexes me confirmaient que j’étais alerte. Arrivées au Pignon Rouge, un tollé de jappements nous avait sauté aux oreilles. Sourire aux lèvres et le souffle peut-être un peu court, nous avions franchi la porte du non-retour. À ce moment-là, peu importaient les questionnements et les doutes: un ours-polaire-chiot avait conquis nos coeurs. Une vie poilue de huit semaines s’invitait chez nous.
De huit semaines, nous en sommes aujourd’hui à huit mois. Six mois se sont donc écoulés depuis son arrivée. Six mois pendant lesquels notre vie a connu quelques petites révolutions. Notre patience a été mise à l’épreuve. Nos peurs ont refait surface. Nos inquiétudes ont aussi trouvé leur chemin. Entremêlée de fou rires et de moments attendrissants, chaque journée s’est déroulée de façon plutôt inattendue, même dans les moments où nous nous sentions préparées. D’un bébé chien pour lequel je croyais avoir à jouer un rôle accessoire, je me suis retrouvée en avant-plan. J’avais maintenant trois enfants. Oui, je sais, on me dira qu’un animal n’est pas un môme. Pourtant, chaque fois que j’en croise un, la présence de chacun d’entre eux me parait revêtir autant de vie, une conscience différente et une allure particulière, bien sûr, et surtout un être à part entière. Observer, ressentir et écouter. Humain, animal ou végétal, c’est du pareil au même et, par conséquent, tout aussi frappant (en fonction du regard que l’on choisit d’y poser, bien entendu). Prendre ce bateau d’expériences, c’est embarquer à bord d’un nouveau projet familial. Et c’est avec celui-ci que mes enfants m’ont confié, pour la première fois, qu’elles avaient l’impression que notre famille était enfin complète.
DÉCOUSUE
À travers les petits accidents, les objets mordillés, le désengagement des enfants quant aux tâches associées à Zuko (soins et besoins), les suivis et autres surprises, j’ai tellement, tellement eu l’impression de voir des expériences du passé défiler. À ma grande surprise, les enjeux et les défis posés par cette nouvelle réalité formaient une mozaique assez singulière, de sorte que chaque événement me rappelait les sensations, les émotions et le mal-être de passages particulièrement éprouvants vécus au cours des dix-huit dernières années. Je me suis sentie plongée, assez régulièrement, au coeur d’une blessure que je croyais guérie (ou que j’avais écartée). Des ondes de détresse, un sentiment d’abandon/de trahison, une poignante impuissance en me retrouvant seule à devoir tout prendre en main pour continuer d’avancer…Des vagues de colère face à l’absence, la tristesse de ne pas pouvoir offrir une énergie que je ne possède pas et le découragement face à l’ampleur de la tâche. Je me sentais démunie. Au crépuscule d’une liberté que j’avais l’impression de tranquillement retrouver, je comprenais qu’il me faudrait encore m’armer de patience et d’ingéniosité. Il ne s’agissait que d’un chien et pourtant. Difficile de faire fi de tout ce qui était momentanément remué. Je ne m’y attendais pas, mais alors, pas du tout!
REVISITER Comme lorsque mes filles étaient enfants, j’ai passé des heures à prendre soin, à réparer, à nettoyer, à entraîner, mais aussi à faire la paix avec mes choix. Entre la détermination, la ténacité, la persévérance et le lâcher prise, à l’image de tout ce que nous entreprenons et visitons, l’idée d’être à l’écoute de mon système nerveux et d’être sensible à celui des autres s’est immiscée parmi nous. Bref, les petits défis se sont mués en messages et, à mes yeux, en belles opportunités de guérison. Ralentir encore le rythme, remodeler les priorités, se réveiller la nuit, parfois, pour apaiser l’un ou l’autre, pitou inclus. Des moments aussi précieux que le challenge sous-jacent. Impossible de continuer d’éviter le repos (le vrai), de travailler 18h sur 24, d’oublier de déléguer, etc. Un animal, comme un enfant, imposent un minimum de présence. Un animal, comme un enfant, transforment les vies. Au moment d’écrire ces lignes, après avoir passé la nuit à suivre Zuko, souffrant d’indigestion (vols qualifiés à la cuisine pendant que j’avais le dos tourné), rouleaux d’essuie-tout et bouteille de spray nettoyant en main, bottes à proximité pour sortir dehors au premier signal, je me souviens. L’important, qu’on soit humain ou animal, c’est l’amour. Le café couplé au chocolat noir un peu aussi, en fonction des circonstances, mais ce qui compte réellement, je le crois, demeure le choix d’investir présence, amour, empathie et compassion dans les moment où on aurait fort envie de tout foutre en l’air. Il existe de ces espace où il est impératif de fermer sa porte, d’établir des limites et de dire non, histoire de garder sa lumière bien vivante. De refuser de tolérer ce qui n’a définitivement plus sa place. Et puis il en existe d’autres où écouter sa voie, c’est honorer un engagement voué à être sain si on le veut bien. Avec patience
Avec amour, présence, empathie et compassion
En se rappelant qu’il existe des ressources et que nous avons le droit de demander, d’aller chercher support, abondance, douceur, tout comme un peu de facilité. Encore faut-il être prêt à dire oui.
J’ai appuyé sur « Publier » entre autres parce que ça me rend mal à l’aise. Qu’est-ce qu’on va en penser, encore une fois? (Oui, c’est le genre de chose qui me traverse souvent l’esprit.)
J’assume. Parce que j’ai l’impression qu’il faut que ça se parle, beaucoup, beaucoup plus. Et parce que je nous aime, pour et à tous ceux et celles que j’ai vu rusher depuis un bon bout, qui me touchent et qui me chamboulent aussi.
C’est un peu moins bien écrit que d’habitude, mais c’est franc, promis, à 100%.
Isabelle
xxx
En rencontrant les collègues, sur l’île et sur une ligne de départ d’octobre, j’ai retenu l’un des messages qu’on m’avait lancés: « que ton rêve trouve son chemin * ici. »
Mon plus grand rêve, c’est la santé, à tous les niveaux. Une santé en or (oui, je suis ambitieuse). Et que mes enfants se donnent le droit de croire en les leurs, de rêves, le droit d’avancer, quotidiennement, en les nourrissant.
Au cours des quelques dizaines d’années que compte ma vie, j’ai eu la sensation de me battre continuellement pour ma santé. Me battre pour accepter de me donner le droit de vivre et de me permettre d’être celle que j’avais envie d’être; vraiment. Du combat, j’en suis venue, depuis peu, à l’idée de l’accueillir, comme on accueille la respiration, plutôt que de tenter de l’absorber.
Et dans l’accueil, à ma façon, j’ai cheminé.
Décembre
Décembre approche et avec lui, son vent de changement. J’ai encore tendance à croire que ce que l’on ne voit pas existe aussi. Depuis un moment, j’y porte une attention particulière, observant des gens, ici et là, qui souffrent, souvent en silence. Nos santés mentale et émotionnelle ont une importance qui mérite – et qui a besoin – d’être davantage reconnue. Dans la vie, dans le sport, au travail, en famille et entre amis. Collectivement, nous fournissons des efforts, mais sommes-nous vraiment à l’écoute dans les petits, comme dans les grands moments de tous les jours? Nous permettons-nous de partager sans craindre qu’on nous juge à tout vent? Assumons-nous ce qui est? Plus que tout, est-ce que nous nous assumons?
Je connais un peu trop bien l’anorexie, la dépression, l’anxiété, l’épuisement qui mène vers le burn out. J’ai côtoyé, de proximité familiale, la bipolarité, la dépendance, le narcissisme et autres problématiques conduisant, un peu trop souvent, au suicide lorsque le corps ne plonge pas momentanément au cœur d’une maladie (physique), laissé avec un air hypothéqué. Un corps pucké (100% assumé – pas d’apitoiement ici).
L’équilibre, c’est bien personnel. Et c’est fragile. Encore plus, pour plusieurs, depuis deux ou trois ans.
Je nous souhaite de rencontrer des gens qui nous inspirent, qui nous font sourire et même, pourquoi pas, rire aux éclats. Pas juste en surface; en profondeur. Surtout. Je nous souhaite d’oser nous ouvrir à d’autres humains et humaines, pas seulement entre les murs d’une salle, en clinique, mais de vive voix, un jour ordinaire. Je nous souhaite d’échanger, simplement, en prenant conscience de la beauté du moment, de l’opportunité pour soi, pour l’autre, pour vous, de partager une saine interaction. D’être, véritablement.
Accueillir
Accueillir, c’est offrir un espace. Un peu de ce qui est sacré en soi, en l’autre aussi (en sacrant québécois ou pas, au choix). Avec des mots ou en silences entrelacés. Avec des conversations, je l’espère, même si elles ne sont pas toujours fournies comme les arbres en été.
Accueillir sans charger son dos, mais plutôt en éclairant la route et en tendant la main, au besoin. Accueillir sans absorber.
Permettre et partager une présence – Se donner le droit
Je nous souhaite enfin de marcher vers ce qui nous anime encore (de courir, lorsque c’est possible), en santé. En la cultivant, toujours
Entre décembre et janvier
Puis entre janvier et décembre
(Mettre sur repeat😉
Photos des collègues sur l’Île intense: Kelsey et les irréductibles, Béatrice et le groupe de feu, Sangé et son projet, Christophe, Cindy et Tino.
« Nous possédons tous en nous de ces talents dont nous n’avons aucune idée. Et se trouvent devant nous ces chemins, au coeur de nos vies, que nous pouvons emprunter à tout moment, que nous ne voyons jamais, parce que nous ne les empruntons jamais. Lorsque nous savons qui nous sommes, nous savons aussi que nous pouvons remplacer des idées noires par d’autres idées.
On peut se faire une promesse à soi-même, aussi petite soit-elle. Il peut s’agir de prendre une marche. Il peut s’agir, tout simplement, de se réveiller avant midi. C’est une petite promesse que l’on s’offre à petite échelle. Elle peut sembler minuscule, mais l’important, c’est de tenir cette petite promesse que l’on se fait. Chaque changement positif dans ma vie s’est construit à partir de cette capacité de tenir une petite promesse que je me suis faite. Les changements prennent place, petit à petit, et on peut en faire une habitude quotidienne en commençant, avec lui, la journée. Et nous nous transformons, devenons gagnants en accumulant une petite victoire après l’autre, chaque jour. C’est comme ça que ça se passe. »
La dernière année aura été riche en apprentissages, à l’instar de chaque moment, de chacune des petites promesses, menant à de petits engagements auxquels j’ai donné voix au cours des douze dernières années. Emprunter les chemins de ce qui semble inatteignable pour redresser le quotidien. Continuer d’avancer malgré l’incertitude. Prendre le pouls autour et faire le choix d’avancer malgré les silences, les jugements, l’apparente solitude. Plonger à bras-le-corps au coeur de pratiques en souhaitant voir le tableau s’éclairer. Soupirer, parfois. Rencontrer des gens, sourire de satisfaction, feindre la compréhension et peut-être choisir de refermer certaines portes pour en ouvrir d’autres.
Trouver, toujours, une seconde, une minute d’émerveillement au quotidien.
Une année de projets, de famille, de créativité. D’espace qui s’ancre tout doucement pour le repos, pour que se regénèrent le corps, le coeur et l’esprit. J’ai tendance à croire que l’équilibre est un concept bien relatif et qu’il varie en fonction de nos individualités. Qu’on peut s’inspirer de modèles, de théories et de techniques, mais qu’il n’existe véritablement de formule que pour un être humain à la fois. Les variations sont inévitables et peut-être nos chemins se forgent-ils à l’image de nos ADN: uniques (mettons de côté la notion de clonage ici…!).
Un chemin en croise un autre et les possibles sont multiples, voire infinis en fonction de ce que nous choisissons d’entreprendre ou d’éviter. De là naissent la beauté, le mystère et parfois le grand désarroi reliés à nos expériences humaines. Un périple nous plonge dans l’observation de cette multitude et je dois avouer que chacun de mes déplacements accentue la réflexion en lien avec ces choix, les limites que nous nous imposons, ce qui existe et ce que nous avons l’opportunité de vivre lorsqu’on y croit. Lorsqu’on y croit vraiment.
D’une certaine façon, les concepts de bon ou de mauvais choix sont bien relatifs aussi. Certaines expériences de vie semblent plus difficiles que d’autres, mais encore là, nos tolérances, notre aptitude à la résilience, notre présence, notre acceptation de ce qui est changent les trajectoires, puis les résultats. La vie n’est pas juste. Elle est vraie. Pleine. Crue. Vibrante si on le veut bien.
Chaque défi sportif, créatif et familial me plonge au coeur de ces réalités. Chaque nouvel horizon me permet de concevoir que la planète est en fait un bien petit village et qu’il existe tellement plus que nous, que soi. Qu’il y a tant à vivre. Je n’y peux rien: j’y reviens toujours! Et plus le temps file, plus j’ai l’impression de vivre, d’être témoin de transformations chaque fois que j’entreprends un périple, tout comme au retour. Il me semble être habitée par la conviction que plus on se déplace, plus il est difficile de concevoir une vie se limitant à l’endroit où nous posons nos valises. Il faut le vivre pour le ressentir, j’imagine. Peut-être est-ce ce qui se produit lorsqu’on navigue vers ce chemin de vie qui nous alimente vraiment, celui où l’on se sent vibrer, briller de l’intérieur, celui qui nous permet de redonner avec autant de puissance et de lumière, en s’installant véritablement en soi.
Oui mais…la famille, la maison, le travail, les collègues, les amis, les obligations. Chacune de ces considérations possède, en effet, son importance. Nos choix se font alors miroir de cette promesse, cette petite promesse que l’on se fait chaque jour pour, peut-être, pour se permettre de mieux se réaliser, de mieux s’actualiser, de vivre en accord avec celui ou celle que nous sommes véritablement. Une promesse en appelle une autre. Et il n’existe qu’une seule personne qui puisse déterminer notre propre parcours: nous-même, soi, vous. La seule personne qui puisse, véritablement, permettre à tout ce qui veut naître en soi d’occuper son espace. De prendre place. De prendre racine et de connaître son envol. Tout ce qui fait partie de l’interaction est voué à composer avec ces coeurs et ces noyaux qui sont les nôtres. Et il nous revient de décider quelle place, quel espace, quelle importance auront les interactions, les engagements, les choix que nous ferons en équipe ensuite.
Une vie est un voyage.
Dans le confort comme dans l’inconfort
Et tout commence par une promesse
Une petite promesse, une petite victoire pour se construire, comme pour construire un monde
De là naissent les projets, les rencontres, les alliances
De là s’ouvrent les fenêtres, les portes aussi
À nous de choisir jusqu’où s’étendra notre regard, quelle sera la portée de nos choix et de nos actions. Ce qu’on a envie d’offrir, ce qu’on a envie de déposer dans le grand baluchon de la vie. Ce que retiendront les autres. Une naissance et un départ à la fois.
Bientôt 2023, en voie de négociation avec les projets, la création, la maladie et la santé, la magie de ces instants qui ne se produisent qu’une fois. Des kilomètres, de la nature, une faune à profusion, des gens, et bien des découvertes se profilent à l’horizon. Une petite promesse à la fois.
En hommage à ces coureurs et coureuses avec lesquels j’ai eu le privilège de partager un moment ou deux à l’Ile intense
Photo: Kelsey Hogan
« We all have these talents in us that we have no idea about. And we all have these paths in our lives that we can take at any time, that we never get to see, because we never take them. If you know yourself, and you can give yourself something to do, you can replace dark thoughts with other thoughts.
Make a small promise to yourself. It might be a walk. It might just be waking up before noon. It’s a small promise. And you’re going to start really small. It’s going to seem tiny. And all you gotta do is keep that small promise to yourself. Every positive change in my life has built from the ability to keep a small promise to myself. Change starts small and it’s a daily habit of doing a small thing to start the day. And you turn yourself into a winner by having a small win every day. That’s how it happens. » Gordon Byrn